Biens communs. Lexique
Liste des mots (par ordre alphabétique): AbondanceExtrait d’entretien avec Léa Eynaud enregistré le 14 novembre 2014. Dans le cadre d’une réflexion sur les communs, la notion d’abondance m’intéresse. On s’interroge souvent pour savoir comment imaginer une croissance infinie sur une planète dont les ressources sont finies. Ce qui est très juste par ailleurs. Au sein de ce cheminement de pensée, la réflexion sur les communs redonne crédit à l’idée de l’abondance. Il ne s’agit plus de parler de croissance mais d’abondance. Il y a abondance sur cette planète.
AccessibilitéExtrait d’entretien avec Raphaël Bastide enregistré le 27 octobre 2014.
Ensuite parce que le contenu est souvent un bon prétexte pour s’intéresser à la technique. J’ai souvent fait l’expérience de workshops organisés avec des gens qui n’avaient pas l’habitude d’une approche par la technique, et ces profils étaient souvent très intéressants, parce qu’ils avaient ce recul de personnes non connectées. Dans ma pratique, je m’intéresse aussi à faire des choses non connectées qui s’inspirent de processus existants et numériques. A-croissanceExtrait d’entretien avec Michel Coudroy enregistré le 15 mars 2018. Je souhaiterais proposer le terme a-croissance, en référence au texte Bientôt il sera trop tard… Que faire à court et long terme ? dont la conclusion est :
Ce terme vient d’une plateforme signée par plusieurs mouvements sociaux, où les mouvements altermondialistes se rapprochent des acteurs de la décroissance. Les altermondialistes ont longtemps hésité concernant une contestation de type keynésienne, c’est-à-dire de baser la contestation sur le fait que le marché était moins efficace que des initiatives encadrées par des institutions. Faut-il conclure de cela que le marché fait des crises alors que quelque chose de plus encadré produit de la croissance et que le développement durable passe par ce processus ? Ou est-ce que, compte-tenu de notre rapport homme-nature, il faudrait davantage penser l’organisation des rapports sociaux en terme de coopération plutôt qu’en terme de compétition ? Cette réflexion a été longtemps posée, mais peut-être mal comprise par le mouvement de la décroissance, et aujourd’hui, il y a sans doute la possibilité de réfléchir à des modes d’organisation en réseau basés sur la gratuité et l’échange de service. Aussi, il semble possible de vivre tout aussi confortablement avec moins de circulation monétaire. Aussi, nous sommes dans une perspective où il ne s’agit pas directement de mettre en relation la montée du PIB et la montée de la pollution. Les interrogations sont beaucoup plus globales et diffuses. Nous nous plaçons donc à côté de la question de la croissance ou de la décroissance. Nous situons la question sur les modes d’organisation. Cela me semble intéressant car cela fait le lien entre plusieurs mouvements qui vont à l’essentiel aujourd’hui. ActionMon expérience de Disco Soupe montre que, si nous nous situons uniquement dans une organisation revendicative ou de lobbying qui n’a pas de manifestation physique permettant d’interpeller directement les passants ou les consommateurs, la puissance du message diminue .
Dans Disco Soupe, nous essayons de faire en sorte que chacun fasse tout. Notre but n’est pas, par exemple, d’avoir un salarié qui soit chargé de communication. Il est indispensable que chacun continue à organiser des événements. C’est pourquoi même les gens engagés depuis un an et demi dans l’association continuent à mener un ou deux événement par mois.
Action directeExtrait d’entretien avec Emma enregistré le 21 février 2018.
Je sais qu’un ensemble de personnes défendent cette approche, en changeant les modes de consommation, par exemple.
La plupart du temps, même si des grèves sont mises en œuvre, celles-ci ne pèsent pas assez lourd. On n’en parle jamais. Celles-ci se fond écrabouiller assez rapidement.
Partager le fruit de la production des entreprises équitablement. Mettre fin à la fraude et à l’évasion fiscale. J’aimerais que tout cela se passe par la discussion et de façon apaisée. Je pense que tout va se jouer là. D’autres propositions d’actions directes existent. Boycotter le système. Le saboter. Non pas matériellement mais logistiquement. Il s’agit moins d’arrêter de travailler que de mettre le doigt sur les rouages pour les empêcher de fonctionner correctement et forcer un changement de société.
ActivismeExtrait d’entretien avec Elliot Lepers enregistré le 25 mars 2015. AgilitéExtrait d’entretien avec Sophie Ricard enregistré le 24 juin 2017.
Il s’agit de faire en sorte que cela fasse école ailleurs.
AimerExtrait d’entretien avec Frank Adebiaye enregistré le 19 septembre 2013. C’est la chose la plus difficile. Aimer c’est être capable de se transfigurer positivement pour quelque chose. On dit souvent que l’amour est proche de la foi. Pour revenir à cette notion de temps, aimer c’est se faire la promesse d’être meilleur.
De faire mieux. D’être une meilleure personne. C’est cela aimer. C’est d’une puissance considérable. C’est la chose la plus importante des quatre. Le cardinal des cardinaux, c’est aimer. C’est sûr. AlternativeExtrait d’entretien avec Elliot Lepers enregistré le 25 mars 2015. AnarchiveExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019. Le processus de délégation peut apparaître comme une espèce de passation de pouvoir, mais en réalité il engage beaucoup plus de choses que cela. C’est le rôle des hypothèses d’une certaine manière.
Ensuite il faut trouver les moyens de donner à voir et de donner une lisibilité à ces archives. Et surtout, que ces anarchives puissent donner une lisible à tout le processus qui s’est déroulé. Dans le cas de l’Ambassade des communs, par exemple, les uns et les autres, et moi aussi, avions filmé et enregistré des moments festifs, des moments de travail, des moments d’élaboration et de réflexion, des moments de rien, dans les lieux. Et justement, le rien avait beaucoup été filmé, parce que dans les repérages sur le lieu en amont du projet, il fallait montrer cette espèce de séparation, et le rendre perceptible à tous ceux qui n’avaient pas été en contact directement avec le protocole d’élaboration du projet. Enfin, il fallait montrer toutes les bases de la réflexion et toutes les hypothèses qui avait été partagées. Dans ce cas, il est certain que le la forme vidéo est très utile. C’est pourquoi nous nous trouvions avec d’énormes corpus de rushs, qu’ il fallait mettre en forme. Au montage se pose la question de comment mettre en forme, de manière non linéaire, quelque chose qui a tout le temps été suscités et créé en simultanéité. Par cette vidéo, nous voulons rendre perceptible ce processus d’élaboration commun. Il faut lui trouver une structure qui rendent compréhensibles les choses, et en même temps, donner l’idée des surgissements perpétuels et spontanés qui avait lieu. On a proposé à WOS Agence des Hypothèses de traiter cela d’une manière très fragmentaire, par exemple par des split screen et par une écriture cinématographique spécifique et à trouver. AnimauxExtrait d’entretien avec Nathalie Blanc enregistré le 17 mars 2018. Mes premiers travaux de recherche portent sur la place de l’animal dans les villes et des animaux du quotidien, comme le cafard, les insectes, les oiseaux ou encore les animaux domestiques errants, comme par exemple les chats. Cette relation à l’animal est souvent ignorée ou dévalorisée. On dit que les gens qui s’occupent de ces animaux dans les espaces urbains sont des gens de pauvre condition, parce qu’ils n’auraient pas d’autres relations et s’occuperaient donc des animaux à défaut. Aujourd’hui, on voit que cette relation aux éléments de nature en ville est centrale aussi en terme d’identité des collectifs.
AnthropocèneExtrait d’entretien avec Alexandre Monnin enregistré le 21 août 2017. Je m’intéresse depuis maintenant 2 ans à la question de la fin du numérique. Même si cela peut surprendre, il s’agit de questionner l’avenir des technologies, et de fait, la fin potentielle et probable de celles-ci. Je m’intéresse à essayer d’amortir cette fin, d’une part en commençant déjà à y réfléchir, et d’autre part en cherchant des alternatives permettant de se donner les moyens d’arrêter d’utiliser partiellement ces technologies. Nous héritons de cela, nous ne pouvons pas nous en passer, mais cela ne va pas pouvoir durer. Alors que faisons-nous ? Comment essayons-nous finalement de fermer ces infrastructures dont nous sommes totalement dépendants aujourd’hui, mais qui ne sont pas durables ? C’est à mon sens un des enjeux des communs pour l’avenir.
Je prends l’exemple du collectif Bureau d’études, qui fait cohabiter dans ses cartographies des communs positifs et des communs négatifs. Sachant qu’il y a aussi des aspects négatifs dans les communs positifs et inversement. Par exemple, les centrales nucléaires apportent de l’énergie partiellement décarbonée. Et en même temps les communs positifs nous font nous heurter à tout un ensemble de situations où il faut par exemple exclure parfois ceux qui abusent ce des communs. C’est pourquoi la notion d’infrastructure permet de penser ensemble ces deux aspects. AnthropocentrismeExtrait d’entretien avec Xavier Fourt enregistré le 21 août 2017. À mon sens, dans la question du commun et des communs est posée d’un point de vue anthropocentrique.
AppareilExtrait d’entretien avec Anthony Masure enregistré le 7 juin 2015. J’emprunte le mot appareil à Pierre-Damien Huyghe, pour désigner ce qui pourrait être un contraire possible du terme dispositif.
En prenant l’exemple de l’appareil photo, on peut considérer l’appareil comme objet technique ouvert par les réglages qu’il rend possible. On peut modifier la focale, le niveau d’ouverture de l’obturateur. Même si cela consiste finalement en de petits gestes – on tourne un bouton ou une petite molette – malgré tout des choix conscients s’opèrent dans cette pratique. Par extension, on peut s’interroger sur le degré d’ouverture d’un logiciel. Veut-on soutenir des logiciels qui soient non réglables, ce qui est quand même la voix dominante actuellement notamment dans les systèmes d’exploitation des téléphones mobiles et des principes d’app stores en général ? Veut-on aller dans cette direction là ? Ou veut-on encourager au contraire des logiciels appareillés et appareillables, du type des logiciels libres, mais pas seulement ? En effet, certains logiciels libres ne sont pas appareillables car le code source est encombré, mal documenté, ou encore parce que la communauté c’est tombée en désuétude. Certains encore proposent des plugins et non pas les API ouvertes.
Dans le design, il me semble absolument nécessaire de pousser dans cette direction là. Pour exemple, Frank Adebiaye, comptable et typographe avait, lors d’une conversation, soulevé le fait que les comptables avaient plus de liberté de choix que les designers graphiques au sein des panels de logiciels qui leur était mis à disposition. Les designers graphiques sont pourtant censés appartenir à une communauté ou à un groupe des métiers de la création. Or, concernant la partie logiciel, il me semble que ce n’est pas du tout le cas.
On reste utilisateurs des systèmes fermés par commodité, parce que l’on n’a pas vraiment un aperçu des alternatives.
AppartenanceExtrait d’entretien avec Thomas Landrain enregistré le 14 août 2013.
Empathie que nous n’aurons jamais avec un ordinateur par exemple – ou alors sans intelligence artificielle. Mais là, nous rentrons dans un autre domaine. AppropriationExtrait d’entretien avec Béatrice David enregistré le 5 février 2014. Il s’agit de remettre les gens au cœur de leur existence et de leur vie citoyenne, de leur travail et de leur parcours en général. Il s’agit aussi de leur donner les outils.
Il s’agit de pouvoir reprendre la parole, parce que finalement, lorsque l’on est seulement un aidé, nous n’avons pas trop notre mot à dire, si ce n’est en tant qu’aider. Nous ne sommes pas trop écouté. Permettre l’appropriation c’est permettre à chacun de redevenir acteur et d’acquérir une légitimité. C’est aussi avoir une vision plus globale, complexe. Être capable d’avoir un regard critique, de choisir, plutôt que d’aller uniquement dans une voie que l’on nous donne et qui nous oriente. ArtExtrait d’entretien avec Alexandre Monnin enregistré le 21 août 2017. Pour moi, l’art et le commun sont dans des situations intéressantes parce que l’art, finalement, essaie de témoigner d’une forme de singularité. On essaie de produire une singularité.
Cette question m’intéresse à la croisée de deux projets. L’un que j’ai mené et l’autre auquel je me suis intéressé, et qui me conduit à un nouveau projet. Le premier projet est celui dont je me suis occupé pour les Fondation Galerie Lafayette. L’idée était de fabriquer une plateforme pour une fondation d’intérêt général d’art contemporain avec pour enjeu de donner à voir l’art contemporain hors des cadres habituels qui en font finalement un art très spéculatif, qui ne touche pas le grand public et qui concerne essentiellement des gens fortunés qui vont spéculer sur les œuvres. Cette critique habituelle de l’art contemporain n’est pas totalement injustifiée par ailleurs. Par ce projet, il s’agit d’aller voir plutôt la fabrique de l’art contemporain, en rentrant dans les discussions que les producteurs peuvent avoir – car la Fondation Galerie Lafayette est une fondation de production d’art contemporain, avant d’être une fondation qui expose des œuvres. Cette notion de production est très importante car dans le cadre de la production, il y a une discussion avec l’artiste sur ce qu’il fait. Dans ces discussions, il est possible de voir que tout ne se construit pas sans justification, de manière gratuite. Ce qui est produit par l’artiste est soumis à des critères d’évaluation où l’on discute de la direction que va prendre l’œuvre, de la direction où va l’artiste, et de la manière dont il sert l’œuvre qu’il va faire advenir. Et finalement, des jugements de valeur émergent de ces discussions. D’autre part, le fait de doter une fondation d’une archive, c’est l’obliger, finalement, à répondre de son action puisque cette archive va être en partie partagée avec le public. Une fondation a un privilège dans le sens où elle permet de défiscaliser. C’est pourquoi ce privilège se paye au prix de l’intérêt général qu’elle doit servir en contre-partie. Mon travail a consisté à essayer d’articuler spécificité et bien commun et à se mettre au service de l’intérêt général. C’est pour cela que je me suis inspiré des Nouveaux commanditaires, une initiative qui existe depuis plus de 25 ans maintenant. Cette initiative permet à des publics divers et variés, et qui rencontrent un problème, de passer commande d’une œuvre d’art pour transformer la situation dans laquelle ils sont. Il s’agit de faire intervenir un artiste pour produire une œuvre qui va contribuer à cette transformation, en appui du public et dans un dialogue suivi avec ce public. Cela permet de remettre l’art au cœur de la société, de lui redonner un sens et une finalité. Dans ce travail avec les Galeries Lafayette, je me suis largement inspiré des Nouveaux commanditaires pour essayer de penser des dispositifs et des protocoles permettant notamment de travailler avec des artistes qui, eux-même, non pas produisent des œuvres matérielles qui seraient ensuite vendues sur le marché de manière traditionnelle, mais plutôt des artistes qui travaillent sur des situations. Ces artistes travaillent à transformer des situations que rencontrent des publics, parce que, justement, ils sont des artistes et ont une capacité à agir hors des lignes classiques. Et finalement, ils ont une capacité à transformer des situations pour en faire advenir de nouvelles qui n’existeraient pas sans leur intervention. C’est ce décalage qui est la spécificité de leur travail. C’est ce que j’appelle « un art des situations », qu’il faut encourager. On parle parfois d’esthétique relationnelle ou de performance. Cette démarche va bien au-delà. Il s’agit de travailler avec des publics pour transformer leur réalité. J’ai rencontré quelques artistes qui travaillent sur ce mode là. Et c’est effectivement pour moi tout un enjeu de mettre en avant ce type de démarche où, dans ce cas précis, on ne se pose plus la question de la médiation, c’est-à-dire comment atteindre un public, car le public est déjà au cœur de l’œuvre. C’est le public qui rencontre un problème, qui est dans une situation de trouble, qui va amener un matériaux que l’artiste va travailler avec lui.
Je pense que, par ce type de pratiques, on a ici une opportunité très intéressante de repenser un art contemporain qui deviendrait un art des situations, sans abandonner pour autant le souci formel. Ces démarches déplacent les enjeux formels dans d’autres directions que celles que l’on a connu jusqu’à aujourd’hui. Pour moi, les Nouveaux commanditaires, initiative inventée par François Hers et qui est en-soi une œuvre d’art, peut réellement ouvrir des directions intéressantes pour nous permettre d’aller plus loin. C’est une articulation entre art et commun qui me parait tout à fait essentielle. ArticulationExtrait d’entretien avec Jennifer Bonn enregistré le 18 novembre 2013. Chacun a son fil. Les fils se rejoignent, se détachent, s’articulent ensemble.
AutonomieExtrait d’entretien avec Raphaël Bastide enregistré le 27 octobre 2014.
C’est quelque chose auquel j’ai eu partiellement accès, et j’ose espérer qu’un jour des étudiants qui voudront chercher l’information pourront la trouver dans le contexte de l’École. À mon avis l’École est faite pour cela, mais pour l’instant elle ne remplie pas ce rôle. Auto-réplicationExtrait d’entretien avec Thomas Landrain enregistré le 14 août 2013.
AutruiExtrait d’entretien avec Thibault Van Craenenbroeck enregistré le 18 novembre 2013. Je me suis posé des questions sur ce que signifie travailler et participer à des créations de spectacles dans des lieux très différents. Je travaille très rarement chez moi. Je suis toujours dans des endroits où l’on présuppose de l’attitude des gens que l’on va recevoir. Qu’est-ce que c’est que cela ? Qu’est-ce que cette prétention là ? Et en même temps, qu’est-ce que ce pari là ? Cela peut être apparenté à une prétention. La prétention de savoir comment les gens vont être. Penser qu’ils vont toujours agir de la même manière. Et en même temps, ce n’est pas cela. Je pense que c’est plus que cela. C’est peut-être plutôt faire le pari d’une forme d’universalité, de partage. De fait, même si les rapports seront très différents d’un soir à l’autre – de là où je parle, du spectacle, du théâtre – c’est peut-être à cet endroit là que j’aime travailler.
J’adore voyager, mais je comprends les gens qui disent que le voyage est totalement inutile. Il y a des gens qui sont complètement immobiles et qui produisent de chez eux des choses qui ont une portée universelle, connectées, d’une manière ou d’une autre. Quelque part le déplacement est une forme d’agitation quelque peu illusoire. BénévoleExtrait d’entretien avec Pauline Cescau enregistré le 22 juillet 2018. BienExtrait d’entretien avec Nathan Stern enregistré le 15 octobre 2013. La notion de biens communs me parait renvoyer à la notion de bien, dans sa double acception. Dans son acception morale tout d’abord, c’est-à-dire le bien que l’on oppose au mal. Mais aussi dans son acception économique, c’est-à-dire le bien que l’on oppose au service. J’apprécie cette ambigüité du mot bien, qui me parait prometteuse. En effet, si nous parvenons à fabriquer des biens – au sens des objets, des choses qui peuvent se produire, se vendre, s’acheter – qui contribuent au bien commun, alors c’est une très bonne nouvelle pour l’Humanité. Cela représenterait un pas dans le sens d’une démocratisation de ce qui contribue à la qualité des liens. C’est-à-dire de ce qui aujourd’hui est épouvantablement cher. Il y a une grande différence entre les services et les biens. Les biens ne mobilisent pas la présence d’un humain délivrant une prestation, contrairement au service. C’est pourquoi le coût des biens peut être parfois très inférieur au coût des services.
Aujourd’hui, quand un couple est en difficulté, il faut qu’il ait de quoi s’offrir 70 ou 80 euros de l’heure les services d’un thérapeute conjugale. Ou qu’il lise un livre qui ne sera peut-être pas d’une grande efficacité, parce que face à la difficulté, la lecture d’un livre suffit rarement. Il en est de même pour les situations où il y a violence, dans les entreprises par exemple. Dans ces cas de figure, le recours à du personnel qualifié est presque systématique, excluant ainsi la possibilité à une grande majorité des acteurs de pouvoir s’offrir des services aussi chers. Et du coup, ils resteront dans des situations aussi détériorées qu’ils l’étaient au départ. BienveillanceExtrait d’entretien avec Julien Lecaille enregistré le 10 décembre 2017. Le terme qui va avec la notion de transparence est celui de bienveillance. En participant à un commun, on prend en quelque sorte un risque, intrinsèque aux logiques de transparence, de partage et de confiance. On a vraiment besoin d’outils de bienveillance active pour que les choses fonctionnent.
Ce n’est pas simple d’être ensemble. Il y a besoin d’efforts pour supporter le regard d’autrui, pour être un minimum transparent vis-à-vis du regard d’autrui.
Chacun a bien compris que c’était à la fois son intérêt individuel et l’intérêt du collectif que la ressource survive. Du coup, si un problème apparaît, il ne faut pas attendre qu’une règle décide comment régler les problèmes. Il faut régler le problème, c’est tout. Cette bienveillance se manifeste par une présence, un intérêt, des actions contributives.
L’occasion fait le larron, et la possibilité de faire quelque chose de bien engendre l’action. Après, on est content de l’avoir fait, et cela renforce la dynamique collective et puis l’ensemble de la vie du commun. BiotiqueExtrait d’entretien avec Xavier Fourt enregistré le 21 août 2017. Comment nomme-t-on d’autres types de communs qui ne sont justement pas des communs environnementaux ? Ce que je qualifie de communs environnementaux, ce sont des ressources, c’est-à-dire des biens qu’il faut gérer pour le bien de tous. Ces ressources sont aussi nommés biens publics environnementaux. Parfois, les différences ne sont pas très claires. Il existe une nébuleuse de termes qui ne sont pas très bien discernables, et l’approche est toujours très juridicisante. Il s’agit toujours soit d’une question de droit, soit d’une question politique, mais d’une politique malgré tout juridicisé.
C’est un champ de problématisation à ouvrir. BricoleSur Disco Soup, les choses se font à l’arrache. Et tant que nous restons à l’arrache, nous sommes sauvés. Nous allons dans les poubelles, nous trouvons des trucs, bricolons. Cela ne marche jamais, il y a toujours un truc qui ne va pas.
Bureaucrate lumineuxExtrait d’entretien avec Raymond Vasselon enregistré le 26 juillet 2016. Capabilité collectiveExtrait d’entretien avec Cyria Emelianoff enregistré le 17 mars 2018. L’écologie politique reste une grande interrogation. Nous tournons autour de ce mot-là parce qu’on ne sait plus penser l’écologie politique. Nous sommes insatisfaits par les manières de la penser dans les publications qui paraissent.
Mais ce laboratoire représente aussi l’espoir que nos impuissances individuelles pourraient être dépassées par une capacitation collective et des mises en réseau pour nous permettre de peser davantage et de refonder des bribes d’écologie politique situées, c’est-à-dire partagées avec des territoires. Nous sommes, la plupart d’entre nous, issu.e.s de formation en géographie. C’est pourquoi la dimension spatial demeure très importante pour nous, à la fois dans la rencontre réelle des gens mais aussi des espèces vivantes, mais aussi dans le fait que le collectif est, en soi, une capacitation spatiale. C’est dans la rencontre physique que nous pouvons nous encourager, échanger et avoir un dialogue qui va beaucoup plus loin que les rencontres et colloques auxquels nous sommes habitués dans le monde académique. Il s’agit d’être en résidence au même endroit pendant un temps long. Là naissent et se développent des échanges sur le fond qui vont très loin. Peut-être, à terme, des innovations ou des capacités d’action communes peuvent émerger. Pour développer ces capacités d’action communes, je pense que ce laboratoire pirate d’écologie, en tant que collectif, devra sans doute s’articuler à d’autres collectifs, comme par exemple La Myne à Lyon, ou des coopératives de recherche, pour échanger de l’énergie et trouver des modes d’action. Il y a énormément de questions pour lesquelles nous n’avons pas de réponse. Nous créons finalement un abîme de questions qui nous dépassent. Nous ne renonçons pas à nous les poser, même si celles-ci nous dépassent.
CatalyseExtrait d’entretien avec Thomas Landrain enregistré le 14 août 2013. Il ne faut pas oublier qu’un bien commun se définit comme étant commun malgré la pluralité que constitue l’humanité et ses constituants. Un bien commun ne peut être commun que s’il répond à beaucoup d’attentes différentes. La diversité et la complexité d’un système fait qu’il va pouvoir prendre différentes formes et différentes utilités. Il y a une question de robustesse aussi. N’importe quel système est intéressant à partir du moment où il possède une certaine robustesse face à son utilisation. Un bien commun s’instaure en bien commun parce que l’on y trouve un intérêt, sinon les gens ne l’utiliseront pas. Cet intérêt aujourd’hui réside dans des critères tels qu’une utilisation sûre et presque permanente. L’enjeu est de pouvoir transmettre son utilisation. Un bien commun ne doit pas présenter un caractère trop éphémère.
CatastrophismeExtrait d’entretien avec Cyprien Tasset enregistré le 12 juillet 2018. Le catastrophisme est un terme que je reprends au politiste Luc Semal qui a étudié les mouvements de la transition et de la décroissance il y a quelques années. Dans une thèse monumentale intitulée Militer à l’ombre des catastrophes : contribution à une théorie politique environnementale au prisme des mobilisations de la décroissance et de la transition Luc Semal met au centre de l’analyse des mouvements écologistes le rapport à la catastrophe. Il s’agit de ne pas l’esquiver ou l’euphémiser dans la façon dont on la nomme en l’étudiant.
La décroissance est un programme de politique économique dans un débat sur la croissance. La transition est un programme d’activités qui s’intéresse à la question de la transformation des villes.
Cette caractéristique en fait un objet peut-être plus mobile que les politiques de la transition et la décroissance. Le catastrophisme est plus indéterminé et peut, de fait, attirer des acteurs plus hétérogènes, les politiser, transformer leur vision du monde, ou encore les dépolitiser tout autant. CirculationExtrait d’entretien avec Jennifer Bonn enregistré le 18 novembre 2013. L’articulation crée des passages et des connexions, et constitue en soi un dispositif, permettant des circulations d’informations, la répartition des taches.
CitationExtrait d’entretien avec Matthieu Cannavo enregistré le 7 septembre 2015. CitoyennetéExtrait d’entretien avec Yann Heurtaux enregistré le 11 août 2013. Par le terme citoyenneté, j’aimerais introduire l’idée d’une responsabilité face au groupe, qui consiste à dire que nous choisissons ensemble les règles de vie et nous les améliorons.
Extrait d’entretien avec Charlotte Rizzo enregistré le 29 novembre 2014. Extrait d’entretien avec Ophélie Deyrolle enregistré le 21 juillet 2018. Nous sommes nombreux, dans nos contextes personnels ou professionnels, à nous dire que l’on décide pour nous, mais qu’il n’y a rien à faire et que nous ne pouvons pas lutter pour reprendre la main sur les organes de prise de décision, les orientations, la politique. Face à ces enjeux, les tiers-lieux sont un moyen de repasser à l’action et au faire. Construire un dortoir ensemble, un barbecue ensemble. Ce sont de petits actes qui permettent de faire quelque chose de concret et visible. Et le fait de voir est important. Je pense que les tiers-lieux sont très attendus par rapport à cet enjeu. Pour autant, je ne suis pas d’accord avec l’expression “ce sont ceux qui font qui décident” qui ne me semble pas compatible avec l’idée d’accessibilité et d’appropriation par tous. Il existe aussi une forme de dictature du faire, d’une certaine façon. Il me semble important que chacun se sente en capacité de transformer et tester, mais sans imposer. Ce sont des équilibre qu’il va nous falloir trouver.
Le processus qui consiste à faire le pas pour faire quelque chose est important. Ensuite, le résultat de cet action est discutable et doit pouvoir être discuté. Co-autoratExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019. En ce qui concerne l’Ambassade des communs, je voudrais parler de la question du co-autorat. Bien entendu, par rapport aux Nouveaux Commanditaires, j’ai dû signer un contrat. Ce contrat relevait d’un contrat classique pour un artiste-auteur de son œuvre, qui a une finalité qui doit être respectée, sous copyright, et pour laquelle il reçoit des honoraires. Et en réalité, je me trouvais face à une forme juridique qui ne convenait absolument pas. En effet, je considérais, d’une part, que le travail de diagnostic qu’avaient fait les commanditaires de la Maison des Arts, en amont de mon arrivée, était déjà une manière d’orienter toutes les recherches de la “future œuvre”. Les présupposés et préalables, comme les recherches qu’un artiste pourrait faire dans un atelier de manière classique, avait déjà été faites par ce autre groupe.
Cet impensé a posé un sérieux problème aux Nouveaux Commanditaires eux-même, et à la Fondation de France par définition. Qui est auteur de quoi ? Les idées circulent et sont reprises en permanence. Les promotions d’étudiants se succèdent, des intervenants extérieurs sont invités et mobilisés au plan théorique.
C’est pourquoi, quand Contexts, espace de diffusion des projets Nouveaux Commanditaires à Belleville, m’a proposé en septembre 2018, de faire une exposition, j’ai proposé que Contexts devienne une plateforme de réflexion à travers toute une série d’ateliers débats, où on essayerait de prendre la question des communs depuis différents angles, en invitant philosophes, sociologues, juristes pour essayer d’éclaircir l’ensemble de ces questions. CocréationExtrait d’entretien avec Alexandre Guttmann enregistré le 12 avril 2018.
CollaborationExtrait d’entretien avec Sylvain Boissel enregistré le 20 août 2016. CollapsologieExtrait d’entretien avec Joël Marty enregistré le 15 mars 2018. La réflexion sur les communs me paraît d’autant plus importante que je suis aussi en train de devenir un collapsologue amateur. Depuis 5 ou 6 ans, j’ai fait de nombreuses lectures et consulté des vidéos sur différents aspects et cheminements qui nous amènent à l’effondrement.
C’est ce que nous allons essayer de faire au sein du Collectif pour une Transition Citoyenne dans la Loire. CollectifExtrait d’entretien avec Nathalie Blanc enregistré le 17 mars 2018.
J’étudie comment des gens travaillent ensemble dans des espaces urbains ordinaires, et puis font preuve, finalement, de ce que l’on pourrait appeler un environnementalisme ordinaire, c’est-à-dire mettent en œuvre une relation de proximité à leur environnement, qui les invite à le prendre en charge, d’une manière ou d’une autre, au nom d’éléments qui sont de l’ordre de la protection de la nature, de l’amélioration de leur habitat, ou du partage d’un territoire de qualité. Extrait d’entretien avec Ophélie Deyrolle enregistré le 21 juillet 2018.
Pour ma part, je n’arrive pas à faire les choses toute seule, parce que je ne sais pas tout faire et que d’autres savent faire plein de choses beaucoup mieux que moi. Ce qui m’intéresse est de parvenir à faire en sorte que chacun trouve sa place dans un collectif, et que chacun se rende compte qu’il peut aller beaucoup plus loin grâce aux autres, pour soi-même et pour le territoire.
Ce n’est pas facile, d’autant plus lorsque les collectifs sont déjà constitués et que se pose la question de l’intégration nouvelles personnes.
Mon métier et ma formation consistent à faire de la gestion de projets, et j’aime le faire en collectif, en trouvant les bonnes personnes, en mettant en place des processus de transmission, et en faisant en sorte que chacun se sente légitime. Dans le cadre de projets comme celui de la Grande Halle, la coopération est une nécessité. La Grande Halle est une forme de tiers-lieux, c’est à dire un processus qui met en capacité de faire ensemble. Le tiers-lieu est une famille, et je pense que les uns et les autres, nous avons besoin aussi de nous rattacher à des racines. Ces racines peuvent être profondes ou pas, elles peuvent changer fréquemment ou pas.
Extrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019 WOS / Agence des Hypothèses intègre toute personne qui collabore au fur et à mesure de l’état des projets. Les projets peuvent, par exemple, nécessiter des modélisations lorsque des dispositifs matériels sont mis en place. Il faut modéliser les lieux, avoir une approche de design ou encore d’écodesign par rapport à ces lieux. Certains projets requièrent du graphisme pour des questions de signalétique. L’audiovisuel est régulièrement mobilisé pour constituer un corpus d’archives, de tous ordres et de tous supports, qui rendent compte de l’évolution des protocoles des projets et de leur implantation. Il s’agit, la plupart du temps, de travailler sans finalité d’art.
Qu’est-ce que veut dire faire collectif ? Cela peut s’incarner dans une émission de radio, en collaborant à la régie ou en faisant des reportages. Tout le monde n’intègre pas WOS / Agence des hypothèses, et d’ailleurs le fait même d’intégrer ne veut rien dire. Faire collectif, c’est simplement signifier, peut-être comme on le crédite dans un film, que chaque personne est co-auteur, à un certain degré à définir en fonction de ce qui s’est passé. Commande publiqueExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019. La question des biens communs et le rôle réflexif de l’Université du Bien Commun me paraissent importants par rapport à l’action Nouveaux commanditaires, et plus largement par rapport à la Commande publique. La commande publique créé de nombreuses choses, plus ou moins réussies, et plus ou moins onéreuses et acceptables dans notre espace public, qui est notre espace commun. Dans ce cas précis, les décisions sont prises au niveau ministériel ou au niveau d’autres institutions reconnues.
CommoningExtrait d’entretien avec David Bollier enregistré le 17 juin 2015. CommunautéExtrait d’entretien avec Louis-David Benyayer enregistré le 11 octobre 2013. Dans le cadre de la pensée des communs, la communauté me parait être une notion importante. On peut voir en cette notion l’idée d’une communauté agissante qui se structure mais aussi des individus qui contribuent à cette communauté. Extrait d’entretien avec Nathan Stern enregistré le 15 octobre 2013. La notion la plus proche des communs est selon moi la notion de communauté. Si ces notions étaient des planètes, celles-ci seraient toutes proches. Communauté.
Et c’est cela qui émerge de cette notion de communauté : des gens qui vont faire partie de quelque chose d’uni et de cohérent, d’une cohésion. Extrait d’entretien avec Sylvie Dalbin enregistré le 28 octobre 2013. Je prendrais pour appui la logique associative, avec des règles énoncées, une loi qui la régie. En observant la diversité du monde des associations, il me semble important de s’intéresser, au-delà du statut, à ce que met en avant le commun, c’est-à-dire un regroupement de personnes qui, éventuellement, ne se seraient jamais côtoyées si il la nécessité de faire commun ne s’était pas posée.
Si les enclosures peuvent venir de l’extérieur, je pense qu’il y a aussi des biais à l’intérieur de la communauté. C’est pourquoi il faut aussi avoir des idées et des principes internes propres et ne pas mettre en avant que les risques externes. Extrait d’entretien avec Camille Louis enregistré le 18 novembre 2013. En parlant de commun et de communauté, j’opposerais deux visions. (voir notes)
Extrait d’entretien avec Émeline Brulé enregistré le 10 décembre 2013. On commence à se rendre compte que la société de consommation, telle qu’on l’a connue, ne fonctionne pas.
Mais si l’on prend l’exemple de la communauté de Wikipédia, on constate que tout le monde se connait. Et se n’est pas un mal, il faut aussi laisser le temps que les choses se fassent. Et par ailleurs Wikipédia constitue une forme de décloisonnement de par son processus de démocratisation de la connaissance. Le cas des communautés du web est également très éloquent à ce sujet. Il existe une forme d’exclusion par le web, du fait qu’une partie de la population n’y ait jamais été éduquée. ComplexitéExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019. Je pense à un certains courants artistiques, et notamment celui des artistes prestataires, ou définis comme tels. Je pense par exemple à des personnes comme Jean-Baptiste Farkas, d’IKHÉA©SERVICES.
ConcurrenceExtrait d’entretien avec Bruno Carballa enregistré le 04 avril 2016. Les communs m’ont permis de repenser mon projet de thèse sur les théories de la concurrence et le pouvoir de marché. J’ai commencé à développer le lien entre communs et concurrence.
Cet axe de recherche ouvre pour moi un travail conséquent autour sur les définitions théoriques et les politiques préconisées. Cela ouvre de nombreuses questions à propos des outils qui permettent de développer les communs.
ConscienceExtrait d’entretien avec Martin Desinde enregistré le 31 août 2015. Le libre permet de prendre conscience du potentiel d’action que l’on a sur les choses. Les différents systèmes établis (économique, politique, culturel…etc) ne sont pas des institutions immuables, ils ont été mis en place par l’homme et sont amenés à être modifiés, améliorés, ou détruits. Le libre autorise l’accès à la source des créations, il dévoile leur structure, et permet à chacun de comprendre la construction et l’origine des outils qu’il utilise au quotidien. Avoir conscience des choses qui sont possibles, de celles qui sont nécessaires, de ce que permet la collaboration et la libre distribution dans le travail du designer / typographe, c’est envisager d’une autre manière le processus créatif et le travail, mais c’est aussi croire en des alternatives societales, utopiques mais pas irréalisables. ConfianceExtrait d’entretien avec Lionel Maurel enregistré le 25 juillet 2013. En travaillant la notion de biens communs, je me rends compte que la confiance est de plus en plus un mot central.
La confiance que les individus peuvent s’accorder est un élément essentiel dans une communauté qui s’organise en bien commun.
Tous ces mots sont très présents autour de nous, mais ne sont pas une fatalité. Ce qui est intéressant dans les communautés qui se constituent autour des biens communs, c’est qu’elles donnent à voir des exemples concrets qui incarnent la possibilité de prendre une autre voie. Extrait d’entretien avec Mathieu Coste enregistré le 21 octobre 2014. La confiance est une condition absolument nécessaire pour qu’une communauté se développe et qu’un intérêt collectif émerge.
Extrait d’entretien avec Diane Vattolo enregistré le 15 novembre 2014. Lorsque j’étais candidate, j’ai écrit un article sur mon blog à propos de la confiance. La défiance est un sentiment normal, et même nécessaire. La confiance aveugle est une bien moins bonne chose.
Et à partir de ce moment où ce petit peu de défiance existe, ensuite, il faut faire confiance à priori, parce que cela marche très souvent.
En tant que candidate, je suis parvenue à faire des choses dont je ne me croyais pas capable. Et cela parce que l’on m’a fait confiance, et que je me suis sentie investie d’une responsabilité. Extrait d’entretien avec Étienne Hayem enregistré le 6 décembre 2013. Extrait d’entretien avec Sophie Ricard enregistré le 24 juin 2017. Symboliquement, un des objets les plus importants de l’Hôtel Pasteur, à Rennes, est la clé, qui finalement incarne la confiance.
Dans cette société qui ne fait plus confiance, nous essayons de dire l’inverse. Il faut refaire confiance, et ça marche. Cela peut marcher. Extrait d’entretien avec Pascal Derville enregistré le 17 mars 2015. ConfluenceExtrait d’entretien avec Marc Lascorz enregistré le 11 juin 2017. ConnaissanceExtrait d’entretien avec Anne-Sophie Novel enregistré le 5 septembre 2013. Un des enjeux de la construction des communs réside selon moi dans la circulation de l’information et dans la façon dont la fluidité de cette circulation permet aujourd’hui de partager auprès d’un plus grand nombre et d’accélérer le changement.
Extrait d’entretien avec Nadine Jouanen enregistré le 16 novembre 2014.
Je veux dire, un village africain qui meurt de soif et qui apprend à cultiver ses légumes avec la permaculture a des chances de survie supérieure. C’est une question de connaissance et d’accès à la connaissance. Il ne peut y avoir de communs sans connaissance. ConsidérationExtrait d’entretien avec Yoann Duriaux enregistré le 9 octobre 2017. Consommation de masseExtrait d’entretien avec Matthieu Cannavo enregistré le 7 septembre 2015. ContinuitéExtrait d’entretien avec Sylvie Dalbin enregistré le 28 octobre 2013. Je pense qu’il faut se saisir du vocabulaire comme un facteur clé. Les mots ont de l’importance. Prenons le cas des termes « information » et « actualité ». Les professionnels de la communication ou les journalistes parlent d’ « information ». Pourtant ce qu’ils produisent est, selon moi, non pas de l’information mais de l’actualité. Les professionnels confondent l’information spécialisée, dont les gens ont besoin, et l’actualité. Dans les pays anglo-saxons, la différence est bien plus claire qu’en France en terme de vocabulaire.
Par exemple, il y a 7 ans, on a fusillé le centre de documentation du sport. Le fond documentaire s’est vu éparpillé. Et maintenant j’entends dire qu’on va le reconstruire parce que ce dispositif nous manque. En effet, dans tous les pays il y en a un. Pourquoi en France il n’y en aurait pas ? Il va être coûteux de remonter ce qui existait depuis 25 ans. Et ceci est un exemple. Ce phénomène de rupture, je l’observe en en permanence. Dans le monde anglo-saxon, il y a une continuité de principe, malgré des restrictions budgétaires très fortes qui imposent une optimisation des dispositifs, des fermetures de services et autres mesures. Mais il existe une pérennité dans le temps, malgré les difficultés économiques. En France, nous faisons la révolution à chaque fois qu’un nouveau chef arrive. On fait table rase.
ContradictionExtrait d’entretien avec Violaine Hacker enregistré le 20 octobre 2014. De la critique de l’économie orthodoxe et de cette vision statique des communs aboutit une réflexion sur les notions de diversité et de contradiction.
Prenons l’exemple de l’étude réalisée par l’Université Catholique de Paris et Vivendi (c’est un partenariat public/privé) à Loos-en-Gohelle, ville du Nord-Pas-de-Calais. Cette ville minière, qui était autrefois en situation en déshérence, est aujourd’hui un véritable lieu de créativité et d’innovation, notamment en ce qui concerne le green business. À Loos-en-Gohelle se mettent en œuvre de très nombreuses réunions de concertation, et c’est formidable, parce que les citoyens peuvent s’exprimer. Sauf que si l’on s’arrête à cette démocratie participative, alors on oublie les contradictions.
ContributionExtrait d’entretien avec Louis-David Benyayer enregistré le 11 octobre 2013. Construire un bien commun nécessite des contributions. Formulé de la sorte, cela semble très banal. Mais c’est là que réside en grande partie notre capacité à le réaliser. Cela suscite des questions que je trouve passionnantes. Comment s’établie la contribution ? Sur quelle base et sur quel contrat social ? Quels équilibres déclenchent des contributions ? Comment entretient-on à long terme la contribution ? Comment prend-elle de nouvelles formes ? Comment évolue et se pérennise-t-elle ? Pour y répondre, on peut s’appuyer sur des exemples fameux : Wikipédia, qui est un modèle de contributions récurrentes absolument fantastique et éblouissant. Nous commençons, avec le recul de ces dix dernières années, à comprendre et à mesurer quels sont les ressorts de cette contribution. Par contre, nous voyons qu’il existe beaucoup d’autres wiki qui parviennent plus difficilement à mobiliser des contributeurs. Donc, on voit bien que ce n’est pas seulement en analysant les façons dont Wikipédia a réussi à développer un modèle contributif fort et en les appliquant à un autre contexte que les choses se résolvent. Je crois qu’il y a bien les deux. Pour tout les individus, il y a probablement un panachage de ces différentes natures de rétributions, et au global, on voit bien qu’il y a une peu de ces deux dimensions-là. ConvictionExtrait d’entretien avec Elliot Lepers enregistré le 25 mars 2015. CoopérationExtrait d’entretien avec Alexandre Monnin enregistré le 21 août 2017. Avec Manuel Boutet, sociologue à l’Université de Nice, spécialiste et connaisseur des jeux et des jeux vidéo, nous avons eu la chance de mener une expérience en étant invités au sein du Chelsea College of Arts. Nous avons eu la possibilité de jouer à Utopoly, une version détournée du Monopoly. Ce détournement initial des règles du Monopoly a pour objet de favoriser un travail sur les communs. Nous les avons nous-même partiellement détournées pour faire du Monopoly un instrument qui nous permette de visiter différent lieux. Nous avons par exemple joué au sein des Fondations Galerie Lafayette, pour aborder les questions d’intérêt général. Nous avons également joué à Islington Mill, un bed et breakfast mais aussi une résidence d’artistes à Salford, à côté de Manchester. Ce lieu héberge une initiative nommée Temporary Custodians, qui rappelle la démarche des Nouveaux commanditaires. Pour nous, ce jeu est devenu une sorte d’instrument nous permettant d’aller dans des organisations qui ne répondent pas aux règles habituelles, pour essayer de comprendre comment elles fonctionnent, s’articulent, produisent de la coopération et du commun. Nous nous intéressons en particulier aux valeurs dont témoignent les acteurs qui sont parties-prenantes des lieux. Cette expérimentation autour du jeu nous a réellement permis de faire apparaitre des points extrêmement intéressants pour comprendre ce qui se passe dans ces lieux d’exception. En fait, nous essayons de créer une sorte de bulle hors du quotidien. Un espace qui peut libérer la parole autour du jeu, pour faire une mise à plat des valeurs (au sens de « ce à quoi nous tenons, et ce qui nous tient »). Il s’agit de comprendre comment s’articule la coopération dans ces lieux et quel est leur horizon. Jusqu’ici, nous avons été assez ravis par les expériences que nous avons pu avoir. Nous faisons cela dans une perspective de chercheurs qui viennent, sans imposer un savoir, avec la motivation d’apprendre.
Dans la recherche publique, nous ne sommes pas du tout préoccupés par ces dimensions là. Il est très difficile de les exprimer de manière officielle. Nous venons pour apprendre et essayer, par notre petite contribution, de permettre à ces acteurs eux-même d’expliciter un savoir dont ils disposent déjà. Corps socialExtrait d’entretien avec Gwenaëlle Bertrand enregistré le 01 novembre 2018. Je souhaiterais proposer de réfléchir sur la notion de corps social.
Bien sûr, on pense d’emblée à Michel Foucault, qui parlait du corps comme objet et cible du pouvoir. Il expliquait qu’à l’aide d’un quadrillage des corps et des comportements, le pouvoir pouvait administrer des conduites. Il parlait de biopouvoir.
Si l’on revient sur l’ensemble des termes que j’ai abordé dans cet entretien (provisoire, déconstruction, protoforme et corps social), on s’aperçoit que le singulier n’est pas simplement le constituant des communs. Il semble en être une approche. CritiqueExtrait d’entretien avec Bastien Guerry enregistré le 29 juillet 2013. Les notions « partage » et « critique » me paraissent importantes.
Extrait d’entretien avec Cyprien Tasset enregistré le 12 juillet 2018. La critique est une notion qui est originelle pour moi en sociologie, puisque la personne que j’ai pris comme directeur de thèse, Luc Boltanski, est associé pour l’éternité à l’idée de sociologie de la critique. Et il a précisément publié un livre intitulé De la critique. Précis de sociologie de l’émancipation dans les premières années où je faisais ma thèse avec lui. C’est une notion qui est centrale dans la question de “comment on fait de la sociologie ?” parce qu’elle exige beaucoup de réflexivité
Il y a aussi la nécessité d’être très attentif aux variantes de la critique, à ses oppositions, ses contradictions et à la façon dont elles sont en train de se transformer. CycleExtrait d’entretien avec Raymond Vasselon enregistré le 9 octobre 2017. DécentrerExtrait d’entretien avec Anthony Masure enregistré le 7 juin 2015. Pour finir, je prendrais une des notions de ma conclusion. Ma thèse se résume en une série de verbes d’action pour ouvrir des pistes pour les designers aujourd’hui. La liste complète de ces verbes est la suivante: décentrer, authentifier, appareiller, traduire et desarticuler. À la base, le web, tel qu’il s’invente dans les années 90, est un réseau décentré.
Ces centres du web relèguent l’information à la périphérie. D’ailleurs, le terme de périphérie apparaissait déjà dans le texte de Tim O’Reilly en 2004. En périphérie, c’est ce qui n’a pas encore réussi à se constituer en centre, et qui est dépendant des grands centres du web. C’est donc assez paradoxal. Si l’on avait à la base un modèle et un système de pensée et d’information qui était décentré, ouvert – même si je schématise un peu l’utopie – aujourd’hui, un certain de nombre de personnes s’inquiète d’un possible recentrement du web autour de ces grands pôles. Aussi, dans le cadre d’une réflexion sur les pratiques de design, et notamment celles qui sont liées au numérique, un des termes que je propose est le terme « décentrer ». Les centres du web ne profitent qu’à peu de personnes et créent beaucoup de dépendances et de conditionnements au sein des usages. L’enjeu est d’en échapper pour développer des pratiques libres, il est important de penser des systèmes qui soient décentrés.
Je fais un lien assez direct entre cette idée d’absence de centre et de pratique, étant donné que l’on peut supposer que les pratiques qui se recentrent deviennent, une fois qu’elles sont majoritaires et injonctives, peut-être un usage. Du point de vue des designers, des programmes ouverts à des pratiques sont bien plus stimulants qu’un ensemble d’outils qui vont rendre l’action plus efficace et productive. En effet, si tout le monde emploie le même programme ou le même outil cela risque d’orienter la création vers des directions qui peuvent se recouper, même si ce n’est pas une fatalité à 100 %. Ce n’est pas parce que nous voyons les mêmes programme à la télévision que nous avons les mêmes pensées. Certaines courbes, difficiles à tracer, à orienté ou à diriger dans certains logiciels, sont à priori moins utilisées, agencées au sein des formes techniques. C’est pourquoi, quand on passe de la tridimensionnalité de l’écran à la physicalité de la voiture, on trouve une trace, une empreinte directe du logiciel. Si les constructeurs utilisent un même logiciel, il est normal que les carrosseries se ressemblent. Dans l’architecture, cela se vérifie aussi en partie. Dans le design aussi.
En employant le terme décentrer, j’aborde aussi, en début de thèse, la constitution des grands centres du web, Google, Apple, Facebook, Amazon. DéciderExtrait d’entretien avec Frank Adebiaye enregistré le 19 septembre 2013. À un moment donné, il faut agir. Et là le rouge renvoie plutôt à Stendhal, et à l’œuvre Le Rouge et le Noir. Le Rouge est l’armée, et le Noir est l’église. DéconstructionExtrait d’entretien avec Gwenaëlle Bertrand enregistré le 01 novembre 2018. La seconde notion qui m’intéresse relève d’un caractère plus tactique. Il s’agit de la déconstruction, chère à Jacques Derrida.
Jacques Derrida proposait d’agir depuis l’intérieur du sujet, et sans s’attacher à une forme d’occurrence. Puisque pour Jacques Derrida, la déconstruction est toujours emportée par son propre travail. La déconstruction est mouvement. Elle est résiliente.
Jacques Derrida expliquait par exemple que l’individuel et le collectif sont deux entités qui ne peuvent pas exister l’une sans l’autre, car l’appropriation de soi passe ou suppose une assimilation ainsi qu’une expropriation collective. Dans ce jeu, Derrida montrait bien qu’il ne s’agit pas de dualité, mais au contraire de complexité. Un individu n’existe pas seulement par lui-même et pour lui-même, mais aussi par et pour les autres.
DéflexionExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019.
La déflexion est un phénomène physique. Un rayon lumineux a une onde dont la trajectoire directionnelle est unique. Si celle-ci trouve un obstacle, elle sera déviée de sa trajectoire. C’est la déflexion.
Les propositions artistiques peuvent se faire en étant pratiquement invisible ou voire même totalement invisible. J’aime beaucoup une notion mobilisée par les québécois, et notamment Alain Martin Richard, qui l’a un peu théorisée dans le domaine de la performance : c’est la manœuvre.
En ce sens, créer par exemple une Institution comme une Ambassade ou un Ministère, en le nommant comme tel, est une manœuvre. Ensuite, il s’agit de procéder de telle sorte que le dispositif paraisse plausible, en reprenant par exemple le formalisme administratif d’une Ambassade pour le déjouer. Il s’agit d’opérer à son effectivité dans le réel, dans ce qui est opératoire. C’est parfois extrêmement ténu, et pas forcément visible. Mais c’est sur la longueur, sur la répétition et sur l’insistance que les effets se produisent. DélégationExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019. Je voudrais aborder la question de la délégation dans l’œuvre. J’ai précédemment expliqué le statut de co-autorat et la manière dont l’œuvre était co-activée et co-définie au fur et à mesure de ses activations. Je suis allée, bien sûr, très régulièrement à la Maison des Arts de Bordeaux, et notamment pour toutes les soirées, les workshops où était mobilisée la question du design. En décembre 2017, lors la dernière soirée de l’année, en discutant avec les un et les autres, j’ai constaté que le processus fonctionnait sans moi, de lui-même. Radio Campus, située dans le même bâtiment que la Maison des Arts, y a d’ailleurs probablement joué un rôle assez important. La Radio nous avait invités à parler du projet et est venu faire des reportages. Elle a fait un travail de transmission auprès des nouveaux étudiants et des autres étudiants du campus. La Maison des Arts s’est vraiment ouverte à beaucoup d’autres populations, qui jusqu’alors, ne la fréquentaient pas. Par ailleurs, les personnes qui étaient à l’accueil, en tant que régisseurs, ont véritablement joué un rôle très important de coordination de toute l’Ambassade. Ils portent leur badge en permanence, et se sentent très investis pour accueillir les adhésions, remettre les badges, etc. C’était bon. Le projet prenait vie, sans avoir besoin de moi et de Wos / Agence des hypothèses. Finalement, sa vie ne peut s’arrêter à rien.
DémocratieExtrait d’entretien avec Félix Tréguer enregistré le 20 août 2013.
Extrait d’entretien avec Anne-Sophie Olmos enregistré le 25 juillet 2017. Je l’intéresse au lien entre démocratie et communs. Aujourd’hui, on parle beaucoup de démocratie participative. Mais je trouve que ces dynamiques s’inscrivent dans des logiques de compétition : un projet contre un autre, un vote, une pétition. Nous nous exprimons beaucoup “contre”, mais très peu de manière collaborative.
Démocratie de face à faceExtrait d’entretien avec Raymond Vasselon enregistré le 9 octobre 2017. La démocratie de face à face, c’est un groupe d’habitants qui travaille sur un projet, où chacun apporte son talent. Dans cette démocratie là, on ne s’exprime pas seulement avec des mots. Par exemple, on produit quelque chose, et à un moment, le groupe sera plutôt dirigé par quelqu’un qui est très habile avec une perceuse, ou une visseuse, plutôt que par une personne qui dessine bien.
Par ailleurs, c’est forcément un groupe pas trop grand, au sein duquel on peut échanger facilement.
DéprogrammationExtrait d’entretien avec Max Le Guem enregistré le 15 mars 2015. DesignExtrait d’entretien avec Anthony Masure enregistré le 7 juin 2015. Je souhaiterais préciser les liens possibles entre design et Humanités numériques. Pour un designer comme moi, ce lien va de soi.
Mettre des designers en bout de course, cela voudrait dire par exemple que l’on aurait catalogué un ensemble de documents, et que le designer ferait un bel habillage de la base de données, créerait un logo design et une fiche. Mais finalement, le résultat ressemblerait une nouvelle fois à un site comme Gallica, c’est-à-dire un ensemble de grilles d’images, un moteur de recherche et des documents sur des pages isolées.
Je travaille actuellement sur les collections du XVIIe siècle avec un programme de recherche conjoint entre l’Université Paris I et l’École du Louvre.
Il se trouve que la collection sur laquelle je travaille interroge les notions de copie, de reproduction et de postérité.
Dans Gallica, pour cette même collection, les documents sont totalement isolés et dispersés. On ne comprend pas la logique d’origine, telle qu’elle était au XVIIe siècle. C’est un enjeu de design, et c’est la raison pour laquelle les historiens doivent rencontrer des designers dès le début des projets pour instaurer un dialogue critique.
Si cette interface est réussie, j’espère que celle-ci intéressera aussi les designers, qui pourront la donner pour référence, en tant que démonstration d’interface intéressante et dont ils pourront s’inspirer. Il me semble important d’élargir les publics des objets numériques constitués par les Humanités numériques.
DialogueExtrait d’entretien avec Vincent Calame enregistré le 5 septembre 2013.
Je pense en particulier au cas des biens communs numériques, avec lesquels ne se pose pas le problème de la rareté, à la différence des biens communs naturels gérés par une communauté locale par exemple. Extrait d’entretien avec Pascal Derville enregistré le 17 mars 2015. Dichotomie public-privéExtrait d’entretien avec Jennifer Bonn enregistré le 18 novembre 2013. Il y a un sens du mot commun que j’aime bien, mais qui est très spécifique à un contexte politique.
Comment le commun nous sert-il justement à sortir de cette dichotomie là, du public et du privé ? Cette question est intéressante. Extrait d’entretien avec Sylvie Dalbin enregistré le 28 octobre 2013. Nous étions enferrés dans des clivages et des logiques de propriété. Les communs sont une sorte de troisième voie qui n’exclue pas le public ou le privé, mais qui se situe à côté. On a besoin de travailler, dans certains cas, par alliance avec les acteurs publics. Et dans d’autres cas, les confrontations avec ces mêmes acteurs publics seront inévitables. En effet, on sait bien qu’il existe toute une série de sujets où, souvent, la puissance publique a tendance à détricoter du bien commun. C’est une tendance qui date depuis les années 80, et plus précisément depuis Margaret Thatcher et Donald Regan. Il y a donc aussi un travail d’affrontement à mener, contre les démarches des acteurs du marché et des acteurs publics, pour reconquérir ou protéger un certain nombre de biens communs.
Extrait d’entretien avec Charlotte Rizzo enregistré le 29 novembre 2014. DiffusionExtrait d’entretien avec Félix Tréguer enregistré le 20 août 2013.
Digital LaborExtrait d’entretien avec Sébastien Broca enregistré le 31 octobre 2014. Cette notion désigne, d’une part, les activités en ligne qui génèrent de la valeur. Par exemple, effectuer une recherche dans Google, modifier son profil Facebook, écrire du logiciel libre, poster des photos, etc. Mais elle désigne aussi le courant de recherche qui en a pris le nom, et qui essaie de développer un discours critique autour de ces activités. Ce courant revendique notamment que ces activités relèvent d’une nouvelle forme d’exploitation, au sens marxiste du terme, puisque certains acteurs viennent capter la valeur créée par ces contributions bénévoles, réalisées sur le temps libre.
C’est plutôt du travail qu’il reste à faire, à l’avenir. Do-ocratieExtrait d’entretien avec Sébastien Broca enregistré le 31 octobre 2014. Do-ocratie est un terme souvent rencontré dans le monde des hackers et du logiciel. Il traduit une principe qui m’est assez sympathique qui consiste à dire que celui qui fait doit décider. Il me semble que c’est un bon point de départ quand on essaie de s’organiser collectivement et faire des choses ensemble. Je n’aime pas trop les inspecteurs des travaux finis. La do-ocratie me paraît être une bonne manière de lutter contre cela. Extrait d’entretien avec Diane Vattolo enregistré le 15 novembre 2014. En terme de processus de collaboration, un des phénomènes que j’ai pu observé, qui me semble très efficace bien que celui-ci ne me fasse pas totalement plaisir, c’est la do-ocratie. C’est un processus très autocratique plutôt que démocratique.
D’expérience, je me dis que cela n’est pas grave. C’est un phénomène que j’ai observé, notamment, à la Quadrature du net, qui est par ailleurs l’un des trucs les plus efficaces que je connaisse, et qui fonctionne surtout de manière do-ocratique. Je me dis que ce n’est pas grave tant que ces personnes qui prennent des initiatives sont ensuite prêtes à lâcher la main.
DocumentationExtrait d’entretien avec Sarah Garcin enregistré le 16 novembre 2014..
Cela constitue un apport pour la personne qui crée cette documentation, en terme d’apprentissage, de méthode et de réflexivité sur sa démarche. Par ailleurs, c’est une manière de partager de la connaissance que chacun pourra s’approprier, commenter, améliorer, refaire, etc. Extrait d’entretien avec Maïa Dereva enregistré le 6 décembre 2017. DouteExtrait d’entretien avec Elliot Lepers enregistré le 25 mars 2015. Droit administratif des biens communsExtrait d’entretien avec Olivier Jaspart enregistré le 28 mars 2019. Droits sociauxExtrait d’entretien avec Alexandre Guttmann enregistré le 12 avril 2018. Comment les communs peuvent-ils renforcer les droits sociaux, notamment des personnes discriminées par notre système actuel ?
ÉcologieExtrait d’entretien avec Félix Tréguer enregistré le 20 août 2013. Je m’intéresse à l’open hardware, et à des groupes comme Open Source Ecology. Le nouveau rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) va sortir, et nous savons que nous allons au devant de difficultés d’ordre climatique assez importantes.
Écologie politiqueExtrait d’entretien avec Elliot Lepers enregistré le 25 mars 2015. ÉconomieExtrait d’entretien avec Camille Louis enregistré le 18 novembre 2013. Il est important de bien revenir à l’origine des mots, et d’observer comment l’on associe à ces mots des usages, des couleurs ou des modes d’être particuliers. Le terme économie provient du grec ancien oïkonomia, gestion de la maison, constitué de oikos, maison, et nomos, gérer, administrer.
Le dénominateur commun de l’économie actuelle est la monnaie. Par exemple, en Europe, notre dénominateur commun est l’Euro. Pourtant, ce dénominateur commun, créé de toute pièce à un moment donné, est une chose unique devenu le garant de toutes les disparités. Ce système rend équivalentes des situations qui sont, de fait, hétérogènes, et produit du conflit. C’est le cas de la Grèce, par exemple. On a, à un moment donné, appliqué à tous le même schème, sans prise en compte des économies nationales des uns et des autres et en créant des inégalités.
Économie collaborativeExtrait d’entretien avec Bruno Carballa enregistré le 04 avril 2016. J’ai commencé à m’intéresser aux communs à partir de la question de l’économie collaborative, notamment lors d’un stage que j’ai eu l’occasion de faire à la MAIF en partenariat avec l’Université Paris-XIII et Les Rencontres du Mont-Blanc.
Pour un chercheur, c’est peut-être un bon cas d’étude pour rendre compte des dynamiques en jeu et pour penser les politiques qui peuvent aider au développement des communs. Économie de la prédationExtrait d’entretien avec Benjamin Coriat enregistré le 17 juin 2015.
J’ai en tête la société Uber, par exemple, qui se dispense de toutes les règles. Par le biais d’internet, Uber met en lien des usagers et des services et prélève des rentes astronomiques parce qu’elle ne paie pas les conditions de sécurité et d’accès. Elle les prend, purement et simplement. Aussi, sur le plan économique, la question importante à laquelle nous allons être confronté, est de protéger l’économie des communs. L’enjeu sera de trouver une place aux communs dans la société, en les distinguant, radicalement, de l’économie de prédation que les grands du net sont en train mettre à partir d’une grande série de ressources. Il y aura une bataille acharnée, entre eux et nous, pour imposer des modèles. Il s’agira de faire en sorte que cette économie de la prédation ne puissent pas se prévaloir de nous pour imposer ses modèles. Il va falloir dénoncer ces modèles de prédation comme tel. Économie hétérodoxeExtrait d’entretien avec Violaine Hacker enregistré le 20 octobre 2014. L’économie orthodoxe est un système de pensée qui, notamment, marque fortement la culture américaine, avec pour principes dominants l’usage de l’économétrie, les statistiques. Cela se matérialise concrètement, par exemple, par des programmes élaborés par la Banque Mondiale en direction des pays en voie de développement. Son fonctionnement s’élabore dans un premier temps par le montage de dossiers très sophistiqués, basés sur la statistique et l’économétrie, puis par un travail mené localement par des experts.
On parle beaucoup, par exemple, de Smart Cities dans le cadre de Politique de la Ville. Ces systèmes d’action consistent à tout mesurer et à faire des politiques basées sur la ressource (les Politiques énergétiques, les politiques en faveur de l’environnement, le numérique à tout va) C’est peut-être une preuve de développement, mais j’en doute. Je parlerais plutôt de ville sensible tenant compte de l’humain, du désir et des citoyens. Dans les communautés, on ne parle même plus de citoyens, on parle de personnes.
Ce sont ce que j’appelle des chemins de dépendance. On peut d’ailleurs faire une analogie avec la vision marxiste, pas sur le plan politique mais sur le plan de la structure. En terme de méthodologie, Karl Marx se focalise beaucoup sur la structure et l’infrastructure, et considère concrètement que l’industrie va être favorable à l’épanouissement personnel des citoyens. Cependant, les aspects culturels, spirituels, émotionnels ne sont pas pris en compte et confère une vision incomplète de l’économie. Des théories de la pensée des biens communs, et le travail d’Emmanuel Mounier par exemple, s’intéresse à la question de l’épanouissement personnel de l’individu dans la communauté et à la gestion des contradictions. Ces pistes de travail me paraissent davantage satisfaisantes. ÉcosystèmeExtrait d’entretien avec Mathieu Coste enregistré le 21 octobre 2014.
Les questions qui se posent au niveau d’un bien commun se posent au niveau des biens communs. L’enjeu réside dans le passage de l’un à l’autre. Extrait d’entretien avec Julien Lecaille enregistré le 10 décembre 2017. Je suis arrivé dans les communs aussi parce que je voulais mener une recherche personnelle et intellectuelle sur la notion d’écosystème. Je pratiquais une forme d’écologie politique qui était contaminée par la pratique institutionnelle, et qui avait du mal à penser la notion d’écosystème. Sans penser la notion d’écosystème en faisant de la politique, il y avait une tendance à sombrer rapidement dans des formes de paranoïa et d’interprétation excessive des comportements. Je pense que lorsque l’on aborde une lecture systémique ou écosystémique d’un certain nombre de choses, on peut éviter de penser que les gens agissent d’une certaine manière parce qu’ils ont des intentions mauvaises, et on peut plus simplement comprendre certaines manières d’agir dans des logiques de systèmes. Le fait de manquer de ces outils de lecture écosystémique dans des logiques d’écologie politique est véritablement dommageable. Il est donc intéressant pour moi, en tout cas, de continuer à travailler sur les outils de lecture écosystémique. Visualiser des réseaux de complexité ne rendent finalement pas les choses plus compréhensibles. Cependant, je suis rendu-compte que, même si l’on ne décrivait pas un écosystème en entier, il était possible de décrire un certain nombre de communs existants, en considérant que l’on ne décrivait pas tout l’écosystème mais un nœud de celui-ci. Le nœud, dans un certain nombre de cas, peut s’exprimer sous forme de communs, c’est-à-dire sous la forme d’un certain nombre d’acteurs reliés ensemble par une ressource partagée, dans lesquelles il trouve l’intérêt, pour subsister ou pour faire d’autres choses.
ÉgalitéExtrait d’entretien avec Camille Louis enregistré le 18 novembre 2013. Égalité, au sens d’une exigence qui n’est jamais atteinte. Je me rends compte que, dans toute ma réflexion sur le commun, je suis très influencée par Jacques Rancière. Et l’exigence d’égalité est un leitmotiv chez Rancière.
Et dans ce contexte, égale signifie depuis une attention commune, et ne veut pas dire une équivalente. Par exemple, on peut regarder la Grèce et la France comme deux situations communes, non pas au sens où ce sont les mêmes, mais au sens où elles sont égales dans leur droit à permettre une vie digne pour leurs citoyens, pour les grecs ou pour les français.
ÉmancipationExtrait d’entretien avec Guillaume Coti enregistré le 25 mai 2016. Un des mots clés qui me guide, et que je pense trouver dans ces mouvements pour le développement du pouvoir d’agir des personnes, c’est l’émancipation.
ÉmergenceExtrait d’entretien avec Laura Aufrère enregistré le 2 juin 2018. Je ne suis pas spécialiste, mais il me semble important de s’intéresser à tout le travail sur la sociologie des émergences.
On parle maintenant des zones blanches de la culture, comme s’il y avait des êtres humains qui, dans notre société, pouvaient vivre absolument sans culture. Je ne suis pas sûre que cela existe.
Il n’est pas nécessaire de revenir sur la question de l’industrie, de la télévisuelle et audiovisuelle ou musicale. On voit bien que cette logique existe. Les mécanismes de domination des industries culturelles enchassent les individus dans des pratiques de consommation qui figent leur action, et qui les conditionnent d’une certaine façon. Pour autant, il me semble qu’une approche par les communs permet de ne plus considérer qu’il puisse y avoir des zones blanches.
Car si, aujourd’hui, discuter de ces enjeux là revient à aller dans ces territoires dits “blancs” de la culture, et revenir avec un nouveau modèle que l’on va de nouveau imposé, alors je ne suis pas sûre que l’on ait changé quoi que ce soit. À cet endroit, il y a un dialogue qui est manquant. Mobiliser cette émergence de la culture permettrait de remettre en place ce dialogue. EmpathieExtrait d’entretien avec Emma enregistré le 21 février 2018. EmpowermentJe n’ai pas de mot équivalent en français. C’est ce que l’on essaie de faire sur Disco Soupe.
Notre but est aussi de former tous les gens qui sont autour de nous, autant que nous avons nous-même été formés. EnclosureExtrait d’entretien avec Lionel Maurel enregistré le 25 juillet 2013.
Il y avait des biens que l’on disait communaux, des champs, des forêts par exemple, dans lesquels la population avait le droit d’aller pour puiser des ressources, et qui n’étaient pas considérées comme étant appropriées. Puis, il y a eu tout un mouvement des propriétaires terriens pour enclore ces terres et en faire des propriétés exclusives, qui ont fait basculé l’Angleterre dans la révolution industrielle.
Pour les biens communs de la nature, il est assez facile à visualiser, parce que cela prend souvent la forme d’une expropriation d’une communauté. Mais pour d’autres biens, c’est plus subtile. Par exemple, actuellement, il y a des enclosures extrêmement graves qui menacent les graines et les semences, parce que certains acteurs industriels, comme par exemple Monsanto, font déposer des brevets sur certaines semences. Par ailleurs, d’autres semenciers obligent à ce que l’on dépose un titre de propriété sur une variété végétale pour pouvoir la commercialiser. Ce qui fait que les gens qui ne veulent pas s’approprier des graines ne peuvent plus les mettre en marché et ne peuvent plus exister dans le paysage commercial. C’est une enclosure particulièrement grave qui menace les semences. Il y en a une autre en ce moment qui menace les gènes et notamment les gènes humains. Des firmes ont déposées des brevets sur le séquençage des gènes. Et en fait, on ne le sait pas, mais nos propres gènes, à l’intérieur de nous, sont ou pourraient être la propriété de certaines firmes. Enfin, le domaine où ce phénomène d’enclosure se révèle le plus difficile à comprendre concerne justement la connaissance, parce que c’est quelque chose qui paraît par définition inappropriable, mais qui subit ce que Silvère Mercier appelle des enclosures informationnelles. Ces enclosures peuvent prendre des tas de formes différentes, et l’un des points important de l’action du Collectif SavoirsCom1 est justement d’essayer d’identifier ces formes d’enclosures qui restreignent précisément ce qui paraît impossible à restreindre.
EnvironnementExtrait d’entretien avec Anne-Sophie Novel enregistré le 5 septembre 2013. La question environnementale est quelque chose que l’on a trop souvent négligé et les rapports entre l’Homme et la Nature sont vraiment biaisés.
ÉvidentExtrait d’entretien avec Max Le Guem enregistré le 15 mars 2015. ExpérienceExtrait d’entretien avec Frédéric Sultan enregistré le 17 juillet 2013. FaireExtrait d’entretien avec Frank Adebiaye enregistré le 19 septembre 2013. Avec la notion de faire, on reste pour moi dans la métaphore militaire.
Dans notre société contemporaine, nous sommes très encouragés à endosser cette posture. Il faut produire, il faut que les choses fonctionnent.
Cette ligne de démarcation, c’est l’armée et l’église. D’un coté, il y a ce que l’on est obligé de faire et de l’autre, ce à quoi l’on croit. Cette démarcation là existe. Mais il faut faire. Car si l’on n’est pas capable de faire, cela veut dire que l’on n’est pas capable de défendre les siens, et c’est problématique. Donc il faut en passer par là. Moi je crois qu’aujourd’hui que les premières années de la vie professionnelle sont une sorte de service militaire. Ce fut mon cas. On doit être une sorte de serpillère et puis faire la tâche parce que il faut en passer par là. J’affectionne tout particulièrement cette citation d’Ernst Jünger : « À la guerre on apprend à fond son métier mais les leçons se paient cher« .
Faisceau de droitsExtrait d’entretien avec Benjamin Coriat enregistré le 17 juin 2015.
Le respect de ce faisceau de droit signifie l’évolution de ces droits à travers le temps, parce que les collectivités changent et induisent des changements techniques. FéminisationExtrait d’entretien avec Anne-Sophie Olmos le 25 juillet 2017. Dans le cadre de l’événement Fearless Cities, la dynamique de féminisation de la politique était très importante. Cela m’a vraiment fait réfléchir. À Grenoble, notre équipe porte déjà beaucoup cette question-là et est très attentive aux enjeux de parité, notamment au travers nos système de coprésidence. L’adjoint à l’Égalité des Droits fait énormément, et plusieurs de ses actions ont été en avance de phase. Je pense que les femmes ont quelque chose à apporter en plus de ce qui existe déjà dans la politique.
FestifEn considérant le festif comme une forme d’engagement, Disco Soupe rejoint par là beaucoup d’autres mouvements.
FictionExtrait d’entretien avec Maxime Favard enregistré le 01 novembre 2018. D’abord pour s’immerger dans la fiction, il faut y croire. Il faut, se laisser prendre au jeu. C’est une pensée qui ne va pas de soi. On pense au mythe de la caverne, illustration phare de la philosophie Platonicienne qui démontre que la mimésis (à quoi on peut y rattacher la fiction), est un instrument de manipulation des subjectivités.
Ce qui nous est proposé dans ces leurres, aux apparences plutôt séduisantes, c’est une suppression de l’attitude (du choix) au profit d’un nouvel idéal de facilité, un idéal vidé de sensible pour (si l’on peut dire) le plein de sensations. Par ces fictions, on assigne les individus à l’usage d’une norme automatisée, pré-déterminée. La fiction devient donc un rouage important d’un système économique, moteur de la consommation. C’est pour cela que pour certains designers comme nous, il est nécessaire d’en réinvestir le milieu avec un certain positionnement critique.
FoyerExtrait d’entretien avec Émeline Brulé enregistré le 10 décembre 2013. Il faut considérer l’individu dans le groupe et le groupe dans l’individu. Au travers la notion de foyer dont je parlais tout à l’heure, je souhaitais interroger la place de la famille. Comment se situe-t-on dans une généalogie ? Il y a un siècle, on a érigé un modèle de la famille nucléaire qui n’existait pas avant. On considérait autrefois qu’il faillait un village pour élever un enfant. Aujourd’hui, le modèle de la famille nucléaire doit évoluer car il ne correspond plus à la complexité des relations qui nous constituent. Il faut prendre en compte les beaux parents, les frères et soeurs rattachés, etc.
C’est se dire que l’on se constitue une famille au fur et à mesure de sa vie, qui n’est pas celle qui nous avait été donnée. Jeanette Winterson, auteure féministe anglaise, en parle très bien en posant la question suivante : pourquoi être heureux quand on peut être normal ? Dans un de ces ouvrages, elle explique son propre cheminement de vie en tant qu’un combat. Et clairement, cette notion de la famille comme glanée au fur et à mesure et n’étant pas pré-déterminée, est une vision de la famille pour laquelle, je le pense, une partie de notre génération se reconnait. FragilitéExtrait d’entretien avec Pauline Cescau enregistré le 22 juillet 2018. GénérationExtrait d’entretien avec Anne-Sophie Novel enregistré le 5 septembre 2013. Ce qui me semble intéressant, c’est la façon dont on peut s’inspirer des civilisations anciennes, et notamment de la façon dont elles se sont effondrées, en sciant la branche sur laquelle elles étaient assises, et justement ces biens communs.
Les manifestations comme Villes en biens communs constituent l’un des marqueurs de ce phénomène encore émergent. La majorité de la population ne se pose pas encore ces questions. Il y a surement un effet générationnel à l’image des défis qui nous font face et qu’il nous faut surmonter. GénérositéExtrait d’entretien avec Louis-David Benyayer enregistré le 11 octobre 2013.
GouvernanceExtrait d’entretien avec Lionel Maurel enregistré le 25 juillet 2013.
Pour agir et gérer un bien commun, la question de la gouvernance arrive très vite et touche à la dimension politique des biens communs.
On ne peut pas assimiler le mouvement des communs à de l’anarchisme ou à un mouvement libertarien. En effet, ces communautés horizontales peuvent avoir des règles extrêmement strictes. Et Elinor Ostrom indique notamment qu’une communauté organisée en commun doit avoir la capacité de sanctionner un membre dans le cas où celui-ci développerait des comportements le conduisant à saccager une ressource qui est normalement commune. Et cela, on le voit très fortement sur certains objets qui sont organisés comme biens communs. Par exemple, le cas de Wikipedia est un système très horizontal mais très complexe en terme de règles. Il est en place une véritable ingénierie derrière Wikipédia, et la communauté n’est pas tendre avec les membres qui saccagent des articles, ou qui essaient d’introduire des choses qui ne sont pas dans les canons définis par la communauté comme étant ceux du savoir encyclopédique. Dans ce cas précis, on voit bien que la gouvernance peut être à la fois horizontale mais aussi ne pas exclure des règles très fortes. On constate aussi que ces systèmes sont parfois assez dures dans la manière dont ils règlent leurs différends.
Extrait d’entretien avec Irene Favero enregistré le 10 septembre 2013. Gouvernance est un terme que je n’aime pas du tout parce qu’il porte selon moi quelque chose de dépolitisé. Pourtant, j’emploie ce terme au quotidien, et nous parlons, dans le milieu culturel, de nouveaux modes de gouvernance en essayant de réinterroger les manières de faire et de travailler.
Extrait d’entretien avec Étienne Hayem enregistré le 6 décembre 2013. Le thème de la gouvernance est central dans mon travail sur la monnaie. Il s’agit de réfléchir sur la question de qui gouverne (au sens large, ce qui peut impliquer plusieurs personnes) et comment se prennent les décisions.
J’ai des pistes de réflexion mais pas de réponses toutes faites, et je crois que ces questions ouvrent de nouveaux champs d’exploration. Nous sommes au début de ces réflexions, et nous apprenons progressivement à les articuler avec les outils numériques que nous développons. Extrait d’entretien avec Charlotte Rizzo enregistré le 29 novembre 2014. Gouvernance autonomeExtrait d’entretien avec Alexandre Guttmann enregistré le 12 avril 2018. En développant des communs, les gens mettent en place des systèmes de gouvernance indépendants de l’État et du marché. Gouvernance polycentriqueExtrait d’entretien avec Violaine Hacker enregistré le 20 octobre 2014. Il y a différents prismes pour analyser les communs. Ce que j’aime dans Common Good Forum, c’est rassembler praticiens et militants, que l’on appelle les commoners, engagés en fonction de certaines valeurs, et les mettre en confrontation avec des intellectuels. Je pense que c’est un travail à mener actuellement sur la question de la gouvernance des communs.
HabitusExtrait d’entretien avec Xavier Fourt enregistré le 21 août 2017. HybriditéExtrait d’entretien avec Lionel Maurel enregistré le 25 juillet 2013.
Extrait d’entretien avec Marine Seemuller enregistré le 5 décembre 2014. Comment faire des bâtiments plus hybrides ? Comment dans le tissu urbain peut-il faire se côtoyer différentes typologies de logements, des commerces ? Ce sont ces mixités qui sont à créer, et qui sont parfois compliquées d’un point de vue montage. IndividuationExtrait d’entretien avec Alexandre Monnin enregistré le 21 août 2017. Ce terme est utilisé en philosophie, soit pour penser la genèse d’un individu, soit pour penser le statut de quelque chose qui existe, quel qu’il soit. Et plus on étudie ces entités, plus celles-ci nous semblent étranges. Je pense par exemple aux plantes telles que les étudie Francis Hallé. Ce sont des êtres étranges, et plus du tout simplement des sous-animaux comme on les envisageait autrefois. Il s’agit d’une sorte de règne du vivant avec des capacités et des propriétés propres que l’on ne soupçonnaient pas auparavant. On peut évidemment repenser aussi à cette exclamation de Friedrich Nietzsche, disant : « je suis une forêt », c’est-à-dire je ne suis pas un individu. En fait, je suis une forêt fabriquée par ses attachements, ce qui m’environne, et énormément de choses qui ne dépendent pas de moi, mais sans lesquelles je ne pourrais pas exister. À ce stade de la réflexion, on en revient à la fois à cette question des infrastructures, dont je parlais tout à l’heure, et aux attachements qui nous permettent de repenser les composantes du monde dans lequel nous vivons.
Cela peut nous permettre, encore une fois, de penser une économie nouvelle, des formes de vie nouvelles, un droit nouveau pour ces objets que l’on aura préalablement repensés. Je pense que c’est une étape fondamentale pour que le commun ne soit pas simplement une conception de la gouvernance partagée d’une ressource, sans que la ressource elle-même n’ait été repensée ou reproblématisée.
La pensée des communs aujourd’hui a besoin de cet effort-là. InfrastructureExtrait d’entretien avec Alexandre Monnin enregistré le 21 août 2017. Par définition, en sciences sociales, les infrastructures sont ce que l’on ne voit pas.
Et parfois, ces infrastructures nous fond mener une vie que l’on ne souhaite pas mener, et produisent une sorte de phénomène de latence sur ce qu’il est possible de faire. Pour moi, un des grands enjeux est déjà de comprendre et de donner à voir des infrastructures.
Avoir une conception claire de ce que sont les infrastructures, c’est déjà une manière de s’emparer du commun et d’y tendre. InnovationExtrait d’entretien avec Anthony Masure enregistré le 7 juin 2015. J’interroge dans ma thèse, et à la suite de Pierre-Damien Huyghe, le terme d’innovation en passant par l’histoire de la photographie et notamment par Walter Benjamin. Dans un texte de 1931, intitulé Petite histoire de la photographie (suivi en 1936 de L’Œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique), Walter Benjamin étudie comment la photographie, en tant qu’invention, se retrouve en quelque sorte accaparée par des démarches commerciales, et notamment par la production de cartes de visite.
Par extension, et avec beaucoup d’anachronisme par rapport à ce qui l’intéresse, il s’agirait d’être assez prudent avec le terme innovation.
On associe souvent l’idée de nouveauté avec le terme innovation. Ce qui ne va pas du tout de soit. Le principe de l’innovation (in-novation, mettre du nouveau dans sans que cela se voit) se traduit par le principe du brevet. Le brevet va restreindre une capacité technique à un usage précis.
Intellectuels précairesExtrait d’entretien avec Cyprien Tasset enregistré le 12 juillet 2018. La notion d’intellectuels précaires est une notion qui est d’emblée construite comme critique. Celle-ci dénonce une incohérence de la façon dont la vie sociale est organisée et pointe d’emblée une injustice, en mettant en tension une forme de légitimité, de mérite et une situation défavorable de gens qui sont précaires. Cette notion de précarité a deux avatars moins critiques qui se traduisent par l’idée de créatifs culturels d’une part et de classe créative d’autre part. Quelque chose s’est produit pendant la période où je travaillais sur ce sujet, que je décrirais comme une dissolution progressive des appuis du sentiment d’injustice sur lesquels reposait cette idée d’intellectuels précaires.
InterdépendanceExtrait d’entretien avec Emma enregistré le 21 février 2018. Intérêt généralExtrait d’entretien avec Nathan Stern enregistré le 15 octobre 2013. La notion de biens communs me fait penser à la notion d’intérêt général. C’est une notion peut laisser perplexe si l’on considère qu’a priori que nous avons des intérêts particuliers. Cela signifierait une sorte de fusion extraordinaire de ces intérêts particuliers en un intérêt qui serait général, et qui profiterait à chacun, ou plus exactement à tous. Mais comme parfois il y a une divergence, voire un antagonisme, entre l’intérêt particulier et l’intérêt général, on ne sait pas très bien par quel mécanisme cette fusion se fait. Extrait d’entretien avec Béatrice David enregistré le 5 février 2014. Inter-êtreExtrait d’entretien avec Mathieu Coste enregistré le 21 octobre 2014.
InterrogationExtrait d’entretien avec Maxime Favard enregistré le 01 novembre 2018. Je me confronte depuis que je fais de la recherche à certaines affirmations, bien réelles, qui me posent question et qui ont cultivé chez moi une certaine méfiance. Je vais proposer 4 affirmations que j’ai pu croiser par mes lectures, écoutes et échanges lors de journées d’études, ateliers ou colloques. Le terme « affirmation » que j’emploie est assumé, ce que j’essaye de dire c’est qu’au fond, les discours « affirmatifs » sur le design posent, et surtout imposent un jugement de valeur, une morale à la discipline. Première affirmation : La ou les méthode(s) du design : Deuxième affirmation : La fonction du design : Troisième affirmation : La stratégie du design : Quatrième affirmation : La reconnaissance du design : Voici donc quatre affirmations, alors il y en a certainement d’autres. Mais celles-ci sont exemplaires en ce qu’elles procèdent dans l’affirmative par « suppression, évacuation, réductions et rejet ». Mon hypothèse, c’est d’entendre ces affirmations comme des pensées de la négation, « sur » le design et non pas, « pour » le design. Si je dis cela, ce n’est pas par provocation, c’est parce que mes activités de recherche m’ont amené au contraire à reconnaître : des singularités, des points de vue, des rapports, des écarts, comme autant de valeurs pour le design. Et si, une affirmation m’a bien habité, c’est toujours celle de l’interrogation Comme Gaetano Pesce l’annonçait en 1996 :
IronieExtrait d’entretien avec Sébastien Broca enregistré le 31 octobre 2014. C’est une notion qui a un peu mauvaise presse. On peut avoir l’impression que l’on en a assez de l’ironie, que le second degré est partout, que les hipsters ont fait de l’ironie une nouvelle manière d’être, et que s’en est trop.
La médiocrité qu’on leur propose n’est pas du tout à la hauteur de ce qu’ils seraient en droit d’attendre. Et du coup, ils sont ironiques et caustiques, pour ne pas laisser berner par une forme de médiocrité qui n’est pas du tout à la hauteur des grands idéaux qu’ils pourraient avoir par ailleurs. Jardins partagésExtrait d’entretien avec Nadine Jouanen enregistré le 16 novembre 2014.
Et là aussi cela implique la mise en œuvre de logiques de mise en commun, pour des raisons de force, d’économie et de soutien à des personnes plus âgées par exemple. Si je veux qu’une grand-mère qui ne peut pas cultiver son jardin puisse avoir des légumes, il faudra que je lui donne un peu de mon temps. JoieExtrait d’entretien avec Mathieu Coste enregistré le 21 octobre 2014. La joie va de pair avec la confiance. Si il n’y a pas un minimum de joie, de l’ordre de l’épanouissement personnel, d’intérêt non marchand, je ne vois pas comment l’on peut s’interroger sur ces questions là. Il vaut mieux faire des choses déjà bien documentées, liées à l’individualisme. C’est plus simple. JusticeExtrait d’entretien avec Nathalie Blanc enregistré le 17 mars 2018. La question de la justice ou des inégalités est une question que tout à chacun se réapproprie d’une manière ou d’une autre, parce qu’on a le sentiment d’en être privé, ou traité de façon injuste en raison de notre genre, de notre couleur ou de diverses caractéristiques de nos identités. Cette question de la justice est fortement liée à la problématique environnementale. Comment des populations qui sont dévalorisées vivent plutôt dans des espaces qui offrent de pauvres conditions de vie environnementales. C’est une question que les associations et les collectifs se réapproprient grâce à des interventions à des échelles et selon des modalités diverses. Comment ces collectifs parviennent, ou non, à répondre à ces enjeux de manière un peu structurée et organisée, au-delà ou en deçà de l’État qui, aujourd’hui, est plutôt sur le retrait, et fait défaut à bien des endroits ? Toutes ces questions forgent une sorte de panorama de justice, qui est celui de la justice entre-nous, mais aussi vis-à-vis d’un certain nombre d’autres êtres vivants. JuristeExtrait d’entretien avec Olivier Jaspart enregistré le 28 mars 2019. Justice socialeExtrait d’entretien avec Béatrice David enregistré le 5 février 2014. C’est un terme souvent utilisé, et qui résume bien le positionnement politique et philosophique des communs.
Cela consiste à se rendre compte des inégalités qui sont intrinsèques à certaines sociétés et à certains fonctionnements. On sait que, dans la société très libérale telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, les choses ne vont pas se faire naturellement dans l’intérêt de tous.
LégitimationExtrait d’entretien avec Patrick Chenu enregistré le 15 mars 2015. LégitimitéExtrait d’entretien avec Gauthier Roussilhe enregistré le 9 septembre 2018. LibertéExtrait d’entretien avec Étienne Hayem enregistré le 6 décembre 2013.. Les communs touchent à la notion de liberté. Si j’agis de manière contrainte et si je ne suis pas dans une liberté affirmée, alors je ne vais pas créer avec la même énergie que si je choisis et j’y vais. On dit qu’on est dans une société où l’on n’a jamais eu autant de droits et de libertés. Je crois que la monnaie est une forme d’oppression et de domination. Aujourd’hui, par exemple, nous devons payer des impôts. Nous ne sommes obligés de le faire, mais des sanctions existent si nous ne nous soumettons pas à la règle. Et, si demain, payer des impôts était facultatif ? Si cela était conseillé, recommandé mais pas obligatoire, que se passerait-il ? Qu’adviendrait-il si aujourd’hui l’on demandait, comme dans une économie du don, de payez les impôts par choix, par souhait ? Dans ce cas de figure, nous changeons complètement de registre en terme de rapport à la liberté. Nous ne sommes plus dans une contrainte, ou une fausse liberté parce que c’est le contrat social de l’état, etc. Cela changerait quoi dans l’énergie, si les gens étaient libres de donner leurs impôts, leurs contributions URSSAF, etc ?
LicencesExtrait d’entretien avec Bruno Carballa enregistré le 04 avril 2016. Licences à réciprocitéExtrait d’entretien avec Bruno Carballa enregistré le 04 avril 2016. Extrait d’entretien avec Pierre-Carl Langlais enregistré le 22 septembre 2014. LienExtrait d’entretien avec Irene Favero enregistré le 10 septembre 2013. La question du lien est centrale, et déplace l’attention portée sur le bien lui-même pour se concentrer sur tout ce qui tourne autour. Elle permet de dépasser la question de la propriété.
Extrait d’entretien avec Maïa Dereva enregistré le 6 décembre 2017. Extrait d’entretien avec Ophélie Deyrolle enregistré le 21 juillet 2018.
Il s’agit de faire en sorte que les gens puissent se rencontrer, et que chacun se sente légitime à être là, à discuter sans barrières. Faire du lien, c’est à la fois sortir d’un fonctionnement en silos et par catégorisation. Chacun doit pouvoir réaliser que son action ne se réduit pas à une case selon une certaine catégorisation, et qu’avant d’avoir une fonction nous sommes tous habitants d’un même territoire. Vouloir faire du lien ne signifie pas que ce lien n’existe pas déjà. Nous nous positionnons en complémentarité, en étant vigilant à ne pas défaire des fonctionnements qui existent déjà. Nous pensons que ce lien peut se construire par la culture, par des moments de rassemblement où chacun peut se projeter dans une oœuvre artistique qui décale le point de vue . Par ailleurs, cette question du lien est importante pour moi à titre personnel. Nous avons répondu à un concours intitulé La Fabrique Aviva en 2017. C’est au moment de devoir pitcher le projet de la Grande Halle que j’ai pris conscience de mon attachement à faire du lien, à créer des passerelles entre des villages, des vallées, des personnes.
Je pense que le WIP joue un rôle sur le territoire, notamment dans sa capacité à créer des liens entre des réseaux, au-delà des liens entre les individus. Nous permettons à plusieurs réseaux de l’économie sociale et solidaire, de l’économie circulaire, de l’entrepreneuriat traditionnelle, de mieux se connaître et de se rencontrer. Pour autant, je suis consciente que cette transparence et cette ouverture peuvent être l’objet de récupérations. Il est important de s’assurer que ces synergies servent réellement à tous. LimiteExtrait d’entretien avec Gauthier Roussilhe enregistré le 9 septembre 2018.
Si je crée un grille-pain ou une bouilloire, l’énergie qui rend cet objet utile et actif est l’énergie électrique. Or l’énergie électrique n’est pas illimitée. La production énergétique, notamment en France, peut provenir de stocks de gaz, de minerais d’uranium, ou de métaux rares pour faire des éoliennes ou des panneaux solaires.
Actuellement, je fais travailler des designers d’interface et d’expérience à concevoir un site internet en privilégiant un budget énergétique plutôt qu’un budget monétaire. Le but de ce projet est d’arriver à faire un site web qui consomme 1,5 kilowatts/h. Par cette démarche, il s’agit de ré-intégrer la limite dans la pratique du design. Évidemment, il existait des limites auparavant, mais ces limites ne concernaient pas les limites physiques des ressources. Nous définissions les limites au regard d’enjeux liés à l’approvisionnement et aux stocks, dans une conception illimitée de la ressource. Nous définissions des limites budgétaires, des limites techniques ou technologiques. Mais les limites, par ce prisme, ne sont que des “suspends” qui ne vont pas réorienter la manière dont on conçoit les objets. Ces limites vont simplement suspendre une production, le temps que l’on débloque ces contraintes. On ne remet jamais en cause la pratique en tant que telle. Historiquement, cela fait sens.
D’une part, la ressource nous est “donnée”, selon l’héritage du 18ème siècle qui considère que la nature est un don fait à l’homme. Dans un modèle néoclassique, la ressource vaut zéro. Elle est sans valeur. D’autre part, on pense l’humain, tel que l’a définit Adam Smith, comme un être rationnel maximisateur. Selon cette vision, l’homme est un être qui va rationaliser ses choix et ses échanges en vue de maximiser son bonheur. Enfin, dans un modèle néoclassique, si il y a des externalités, c’est-à-dire des rejets liés aux modes de production (par exemple, la pollution), alors il y a une perte de valeur et le modèle ne fonctionnent plus. En effet, d’où puis-je tirer ma plus-value si j’ai une perte de valeur au moment de la transaction ?
LinéaritéExtrait d’entretien avec Martin Desinde enregistré le 31 août 2015. Le libre et le travail collaboratif permettent d’établir une organisation communautaire alternative, proche des théories libertaires. Pas de domination, pas de hiérarchie, mais un travail partagé et autogéré, à contre courant de la verticalité de la société. LutteExtrait d’entretien avec Elliot Lepers enregistré le 25 mars 2015. MaisonExtrait d’entretien avec Patrick Chenu enregistré le 15 mars 2015. ManièreExtrait d’entretien avec Maxime Favard enregistré le 01 novembre 2018. Manière a plusieurs origines, grecque d’abord avec manía (μανία) qui signifie folie. Manía ou Manea, c’est aussi la déesse gréco-romaine qui relève d’après le mythe, du multiple.
Cette pensée laisse une place importante à l’indéfinissable au profit de mises en tension interrogatives. Justement, la prochaine notion qu’il m’intéresse de déployer est interrogation, que j’oppose à l’affirmation. ManœuvreExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019.
On est toujours dans un entre-deux, dans une ambivalence.
MarchandExtrait d’entretien avec Lionel Maurel enregistré le 25 juillet 2013.
La pensée des biens communs est souvent critiquée. Souvent les penseurs des biens communs sont accusés d’être des communistes, ou anarchistes, c’est-à-dire plus précisément des gens qui seraient contre la propriété, en référence à d’anciens modèles.
L’État peut parfois être un allié pour les biens communs, comme il peut être dans d’autres cas une terrible menace, notamment lorsque celui-ci marque une volonté de contrôle des groupes sociaux.
MédiaExtrait d’entretien avec Michel Perret enregistré le 15 mars 2015. MembraneExtrait d’entretien avec Julien Lecaille enregistré le 10 décembre 2017. La membrane est un terme que j’affectionne beaucoup, et qui me semble important pour la manière dont il faut penser les communs. Pour commencer, je voudrais revenir sur la critique souvent formulée à propos de La tragédie des biens communs de Garrett Hardin (1). Ce que Garrett Hardin décrit comme étant un commun, dans son texte, est une pâture surexploitée car les gens vont trop l’utiliser. Or ce n’est pas un commun, au sens où on l’entend historiquement et de nos jours. C’est juste une pâture en accès libre.
Pour qu’il y ait un commun, il faut une forme d’enveloppe autour de celui-ci. Cette enveloppe permet de ne pas faire tout et n’importe quoi avec le commun. Cela pose beaucoup de questions, notamment parce que les communs sont quand même quasiment en accès libre, notamment dans le domaine de la connaissance et de l’information. Je pense que l’idée de membrane, terme inspiré de la biologie, est assez intéressant parce que, par définition, les communs doivent être vu comme des espaces qui laissent entrer et sortir un certain nombre de choses, et qui peuvent bloquer en entrer et en sortie un certain nombre de choses.
Quand une communauté cherche à faire quelque chose avec ce commun, il faut que son pouvoir souverain se manifeste dans la gestion de cette membrane. Il faut qu’il puisse y avoir une forme de dynamique collective qui admette un certain nombre d’interactions avec l’environnement, et qui en refuse un certain nombre d’autres. Cette histoire de membrane met en avant l’idée que si l’on veut penser des formes de ressources qui soient complètement protégées contre leur environnement et qui communiquent pas, qui soient des boîtes noires dont on ne sait pas ce qu’il se passe à l’intérieur, sans connaitre la nature des interaction et comment cela peut se connecter à l’environnement, alors nous ne sommes plus du tout dans des logiques de commun.
Pour cela, il faut vraiment cette idée que la membrane doit toujours rester perméable, et doit éviter de se refermer ou de se recroqueviller, même si c’est difficile.
MéthodologieExtrait d’entretien avec Sébastien Broca enregistré le 31 octobre 2014. On m’a beaucoup reproché dans mon travail de thèse, de ne pas avoir une méthodologie assez claire. En sociologie on nous bassine avec des questions de méthodologie. Cela suffit les questions de méthodologie ! Parfois c’est une sorte de cache misère où les gens déploient des trésors d’ingéniosité pour tenter de prouver que c’est une méthodologie scientifique. Cela cache souvent du vide, voire de l’irrationalité. ModèlesExtrait d’entretien avec Émeline Brulé enregistré le 10 décembre 2013. Je me considère comme une GenY. Je suis quelqu’un qui n’a plus un seul métier au sens strict, quelqu’un qui n’aura pas un parcours fixe et qui fait juste les choses comme les choses peuvent être faites. Pourquoi ? D’une part, parce que notre génération n’a pas vraiment le choix, et d’autre part parce que, pour la première fois, nous avons la possibilité de mettre en forme notre vie comme nous le voulons.
Et le paradoxe est que nous ne savons pas vraiment quoi faire de cette liberté dans un contexte de fort chômage, où les jeunes ne trouvent plus de travail.
Certains textes féministes, à l’heure actuelle, interrogent ces modèles. On a beaucoup parlé de ce qu’était la féminité, la femme. On a dit aux filles de notre génération qu’elles pouvaient vraiment tout faire, et effectivement, elles peuvent tout faire. Un enfant toute seule, des études, un travail, ou les trois en même temps. Acheter une maison, etc. Je ne dis pas qu’il n’y a plus de discrimination, malgré la majorité du genre féminin en terme de nombre de têtes.
Il faut les faire discuter entre eux. Mais je ne pense pas qu’il serait une bonne chose d’avoir de nouveau un seul modèle collectif. Chacun doit faire les choses à sa façon. Mais là, c’est probablement mon côté anarchiste qui parle. Modèle économiqueExtrait d’entretien avec Anne-Sophie Novel enregistré le 5 septembre 2013. Aujourd’hui, nous voyons bien que l’économie collaborative pose un certain nombres de questions et nous invite à réinventer tous les modèles, à en laisser tomber certains.
Michel Bauwens, notamment, porte cette pensée qui mérite qu’on s’y attarde aujourd’hui. Modèle d’organisationExtrait d’entretien avec Sylvie Dalbin enregistré le 28 octobre 2013. MonopoleExtrait d’entretien avec Sarah Garcin enregistré le 16 novembre 2014.. Il faut éviter les situations de monopole, de sorte que chacun puisse choisir, en design notamment, les outils les plus adaptés. MutualisationExtrait d’entretien avec Marine Seemuller enregistré le 5 décembre 2014. MutualismeExtrait d’entretien avec Bruno Carballa enregistré le 04 avril 2016. NégociationExtrait d’entretien avec Léa Eynaud enregistré le 14 novembre 2014. Peut-être le commun n’est-il que l’agencement de compromis puisqu’ils impliquent la collectivité, et que nous ne sommes jamais tous pleinement d’accord ?
Nous sommes plusieurs et nous devons nous répartir les droits sur l’objet. NominationExtrait d’entretien avec Cyprien Tasset enregistré le 12 juillet 2018.
Ce geste critique s’est beaucoup focalisé, il y a quelques années, sur ce groupe ou cette multitude de groupes latents, possibles, au bord de l’existence. Le biais que j’ai pris pour cela s’est incarné dans un processus d’interviews de gens qui pouvaient être désignés par cette nébuleuse de nomination de groupes possibles. Il s’agissait de leur faire parler de leur vie, et de la façon dont ils se nommaient eux-même ou se rapportaient éventuellement à des collectifs. J’interrogeais les différents noms utilisés pour désigner le groupe auquel ils appartenaient, ou pas. J’ai donc abouti, dans une partie des entretiens, à des exercices de bricolage à partir des nominations qui avaient transpiré dans la presse ou dans des livres, militants ou parfois sociologiques, et qui étaient intégrés à la réflexivité des gens interviewés. À travers ces nominations, les interviewés désignaient leurs différents attachements, leurs différents points de fuite et possibilités, entre lesquels ils se sentaient écartelés et souvent en contradiction. Non-humainExtrait d’entretien avec Julien Lecaille enregistré le 10 décembre 2017. Mon grand choc avec Bruno Latour, c’est un livre qu’il a sorti dans les années 2000, qui s’appelle Politiques de la nature. L’auteur y parle de quelque chose qui est fondamentalement inconciliable, puisque la nature est quelque chose qui échappe à l’intention humaine, et que la nature ne peut pas être politique. Et pourtant, on souhaite faire des politiques de la nature. Comment ce fait-il ? Latour réinterroge alors un certain nombre de concepts. Il joue avec des catégories fondamentales de la pensée pour exprimer ce qu’il ressent. dal Il y a quelque chose qui est profondément ancré dans le mouvement écologiste : c’est un mouvement de défense de la nature.
C’est le mouvement conservationniste, de protection contre la destruction des espèces, contre la surexploitation, la destruction, etc.
Il y a des gens qui ont envie de pêcher et de tuer des poissons pour les manger. Il y a des gens qui ont envie d’utiliser le bois de la forêt pour se chauffer ou en faire autre chose. Cette approche n’en demeure pas moins un peu utilitariste.
Bruno Latour reprend la citation des zadistes de Notre-Dame-des-Landes en disant « Nous ne défendons pas la nature, nous sommes nous-même la nature qui se défend ».
Après, il me semble que la difficulté résidera dans la tension sur la ressource. Au final, il s’agit tout de même d’humains qui vont essayer de survivre. Si à un moment, la tension est forte, ce qui risque d’être la cas dans une logique d’effondrement, malheureusement les non-humains risquent de passer à la trappe, j’en ai un peu peur. NormativitéExtrait d’entretien avec Sylvie Dalbin enregistré le 28 octobre 2013. ŒuvreExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019. Il se trouve que, parallèlement au projet de l’Ambassade des Communs, j’ai été sollicitée par Les périphériques vous parlent pour participer à la création de l’Université du Bien Commun en France.
Ce projet a été évidemment déterminant pour continuer la réflexion autour du projet Ambassade des communs.
Ces questions ont été mise en chantier à travers des sessions de rencontre et de travail au 100ECS une fois par mois, les samedis après midi. Là, j’ai rencontré des personnes comme Marie Cornu, juriste et chercheuse au CNRS, et qui a coordonné le Dictionnaire des biens communs. Au travers ces sessions de l’Université du Bien Commun, j’ai eu l’occasion de pouvoir aborder les questions du droit opposable, du droit souple, et j’ai pu comprendre comment tout cela fonctionnait. J’ai également rencontré Violaine Hacker, juriste qui travaille au Common Good forum C’est comme cela, au fond, que quand Contexts m’a invité dans le cadre du projet Nouveaux Commanditaires, j’ai pu inviter ces personnes à débattre de toutes ces questions, en prenant l’Ambassade des Communs comme matrice, d’une certaine manière.
Open SourceExtrait d’entretien avec Thomas Landrain enregistré le 14 août 2013. L’open source et l’open acces sont intimement liés au concept de biens communs.
Extrait d’entretien avec Jennifer Bonn enregistré le 18 novembre 2013. Je suis heureuse de voir que la culture open source commence à déborder partout. On commence à voir, maintenant, le résultat de cette autre manière de travailler ensemble, qui se met en place à des endroits très divers de la société.
De quel droit peut-on faire cela ? L’open source a vraiment permis de questionner la question de l’accès à l’information, appuyé par une évolution du domaine juridique. Mettre une œuvre sous licence ouverte, comme manifeste d’une opposition au copyright, c’est une démarche artistique. C’est un acte qui change le regard des gens sur le système dans lequel ils vivent. C’est aussi le début d’une dissolution des frontières déjà en marche depuis longtemps, renforcée par internet et la une mise en réseau des défenseurs de ces libertés. Il y a un certain nombre de circulations qui sont rendues possibles, et ce réseautage se prolonge dans des aspects très pratiques de nos vies, sur des principes d’entraide et d’échange. Une économie alternative se met en place. Je trouve cela intéressant. Extrait d’entretien avec Aurélien Marty enregistré le 16 février 2015. OutilExtrait d’entretien avec Frédéric Sultan enregistré le 17 juillet 2013. OuvertureExtrait d’entretien avec Louis-David Benyayer enregistré le 11 octobre 2013.
Par ouverture, il s’agit aussi de mobiliser au-delà des communautés qui se rencontrent habituellement. PartageExtrait d’entretien avec Yann Heurtaux enregistré le 11 août 2013. Je vis dans un espace de coworking, je participe à de multiples projets de cocréation, soit pour du business ou simplement pour le plaisir. On construit des choses à plusieurs, on partage des ressources. […]
Extrait d’entretien avec Lionel Maurel enregistré le 25 juillet 2013. Partage, ou mise en partage, est à mon avis un point essentiel dans le processus construction des communs. Il n’y a bien commun qu’à partir du moment où l’on est dans une démarche de mise en partage de quelque chose, ou de gestion partagée d’une ressource.
La question de la récupération est une sujet important lorsque l’on parle des communs, au même titre que la notion d’écologie, qui a subit, à un moment, ce même phénomène. Les notions de communs et de partage peuvent être très facilement récupérables. On entend parfois les politiques parler de biens communs, et cela est dangereux. C’est pourquoi le travail sur les mots est très important.
Donc c’est un mot qui mérite vraiment que l’on s’y attarde. Extrait d’entretien avec Frank Adebiaye enregistré le 19 septembre 2013. Le partage, cela veut dire quoi ? Cela veut dire avoir une famille plus importante, avoir plus d’amis, avoir une communauté.
Pourquoi les gens, maintenant, accordent-ils plus d’importance à leur couple ou à leur vie personnelle qu’à leur travail ? Parce que la promesse de sociabilité et partage leur paraît beaucoup plus authentique dans le cadre de leur vie personnelle que dans le cadre du théâtre des opérations qu’est l’entreprise moderne. Aristote disait L’Homme est un animal social. Chacun a son tempérament, mais le partage reste une nécessité.
Nous parlons trop de choses qui sont extérieures à nous, c’est-à-dire qui ne nous sommes pas consubstantielles.
Il est question de notre humanité. Si nous ne pouvons pas décider pour la Nature, en ce qui concerne notre propre condition, nous avons le choix. Alors peut-être faudrait-il que nous arrêtions de nous maltraiter nous-même ? Et, en cela, il faut prendre conscience que nous avons besoin de partage, en prenant en compte le temps, comme point cardinal. Il faut aller à l’essentiel. Nous n’avons pas la capacité d’être exhaustifs. Extrait d’entretien avec Nathan Stern enregistré le 15 octobre 2013. Si le bien est commun, alors le bien renvoie à une notion de propriété dès lors que ce bien est partagé. C’est la propriété de ce bien qui est partagée. Et ce qui est intéressant, c’est que c’est autour du bien lui-même, potentiellement, que le partage se constitue. C’est parce que l’on partage un bien que l’on va être en communauté. Il y a un certain nombre de biens précieux autour desquels on va pouvoir se réunir, parce que chacun de nous est dépendant de ce bien, et que l’on doit tous sécuriser notre accès à ce bien. C’est pourquoi la notion de partage me semble se situer au cœur de la notion de biens communs.
Extrait d’entretien avec Étienne Hayem enregistré le 6 décembre 2013. Le partage est une valeur essentielle pour moi. Il y a quelques années, j’ai crée un groupe de musique electro sur Faceboook. Le partage est l’essence du projet.
Dans notre exemple, pour notre groupe de musique électro, l’idée a été de créer des compilations pour les jeunes talents et de redistribuer les gains à la collectivité. Extrait d’entretien avec Béatrice David enregistré le 5 février 2014. Partage et accessibilité. C’est aussi un des fondements des communs, et notamment en ce qui concerne les outils numériques et le domaine du libre. Cela consiste à dire qu’il y a certaines connaissances, certains savoirs, certains acquis qui doivent être à disposition de tous, pour les utiliser mais aussi pour se les approprier.
Extrait d’entretien avec Sébastien Broca enregistré le 31 octobre 2014. La notion de partage me semble problématique. D’une part, il me semble étrange d’employer le terme partage lorsque l’on parle de biens non rivaux. La notion de partage me paraît légitime lorsque l’on parle de ressources finies. C’est bien parce qu’il n’y en a pas pour tout le monde qu’il faut les partager. En revanche, lorsqu’il s’agit de ressources numériques, la notion de partage est inexacte car ces ressources sont abondantes et n’impliquent pas un renoncement pour donner la ressource à autrui. C’est pourquoi le terme de partage me semble un peu trompeur de ce point de vue là.
Extrait d’entretien avec Sarah Garcin enregistré le 16 novembre 2014.. Le partage de la connaissance me semble être une clé qui commence à émerger chez tout le monde.
Chacun est nourri d’expériences personnelles qui sont toutes différentes, même si l’on fait la même chose, les mêmes métiers, les même études.
Comment pourrait-on, aujourd’hui, trouver des moyens de davantage partager ce que l’on sait ? Comment développer des moyens pour davantage documenter ce que l’on fait, de sorte que tout le monde ait accès à nos connaissances partagées ? Extrait d’entretien avec Aurélien Marty enregistré le 16 février 2015. Extrait d’entretien avec Alexandre Guttmann enregistré le 12 avril 2018.
Je m’intéresse aux mécanismes ouverts d’accès à la connaissance, qui permettent la réutilisation, la modification des contenus gérés au sein de systèmes de gouvernance horizontaux. Je mets en pratique cette dynamique de partage de connaissances au sein de mon projet de thèse en contribuant au projet Remix The Commons et en particulier à l’Atlas des Chartes des communs urbains, qui recense, documente et met en relation, par le web sémantique, les expériences de communs urbains. C’est une manière de partager des savoirs. Partenariats Public-CommunsExtrait d’entretien avec Anne-Sophie Olmos enregistré le 25 juillet 2017. PauvretéExtrait d’entretien avec Thibault Van Craenenbroeck enregistré le 18 novembre 2013. PérennitéExtrait d’entretien avec Raphaël Bastide enregistré le 27 octobre 2014 J’ai l’impression que l’open source est d’abord une manière d’avoir des outils qui sont pérennes. Les licences libres assurent un suivi dans le temps.
Et cela, je trouve que c’est très intéressant. PersonneExtrait d’entretien avec Violaine Hacker enregistré le 20 octobre 2014. À propos des méthodes d’analyse des communs, je m’appuierais sur Emmanuel Mounier ou d’Aristote, dont le travail porte sur les personnes, leur épanouissement dans les communautés, et le rôle qu’elles vont se donner.
PionnierExtrait d’entretien avec Olivier Jaspart enregistré le 28 mars 2019. PlateformeExtrait d’entretien avec Armel Le Coz enregistré le 25 janvier 2015. PlateformisationExtrait d’entretien avec Michel Coudroy enregistré le 15 mars 2018.
Dans un langage plus commun, on parle d’uberisation. C’est-à-dire l’idée que, parmi les possibilités ouvertes par les outils de coordination numérique, il existe la possibilité de mettre en relation directe, d’une part des gens qui produisent le même service, et d’autre part des utilisateurs de ces services. Ce mécanisme est intéressant parce que celui-ci permet de beaucoup mieux utiliser des ressources de toute nature, comme le temps ou les compétences disponibles. Cela peut permettre d’améliorer le confort de chacun par des échanges de services non monétaires. Mais nous vivons dans un monde où les idées doivent être lucratives, et où il y a eu, par ailleurs, des excès de création de liquidités – comme on dit en économie. Ces liquidités sont bien plus importantes que les richesses matérielles de plus en plus fragiles. C’est pourquoi, autour de toutes ces innovations, gravitent un tas de chasseurs de têtes, ou de business angels. Alors qu’émergent ces plateformes et outils numériques, ce sont les plus fédérateurs qui gagnent tout.
Ce qui a été compris par l’économie financière et privée, c’est que l’on pouvait faire, sur cette base, soit de l’économie de l’échange gratuit – mais cela ne l’intéresse pas – soit au contraire des startups devenant les endroits par lesquelles tous les autres se coordonnent. C’est évidemment un modèle qui est né autour des services à la mobilité comme Uber, des services de logement et autres. Cependant, quand on réfléchit un peu, on se rend compte que tous les producteurs et les artisans pourraient s’organiser sur ce modèle.
Il existe pourtant un ensemble de domaines où l’on pourrait concevoir des possibilités de mise en relation de proximité, qui ne demanderaient pas de rentabilité même et qui faciliteraient tout autant la vie, voire d’avantage. Ces plateformes utilisent des travailleurs qui ne sont même plus salariés, qui ont perdu leur statut. Il y a beaucoup à faire en terme d’encadrement de ces nouveaux phénomènes.
Tout ce qui se réfléchit à très grande échelle n’a pas un très grand avenir. Il faut tout repenser à l’échelle de la commune ou de la municipalité.
Ce phénomène de plateformisation est un enjeu important, mais n’est pas toujours perçu comme tel. Il y a à fois de l’éducation populaire à faire, et puis de la mise en œuvre. PoïétiqueExtrait d’entretien avec Maxime Favard enregistré le 01 novembre 2018.
Plus deux millénaires plus tard, dans les années 1990, René Passeron, remobilisant la figure théorique de la poïetique, distingue clairement la poïetique de l’esthétique. Cette dichotomie exprime une différence fondamentale. L’esthétique est pour Passeron tout l’univers, tout l’univers que nous réceptionnons__ à partir des sens ou encore du langage. L’esthétique s’intéresse donc à ce qui, par essence, est___là (en philosophie on parlerait de da-zain, qui en allemand signifie être là). En revanche, la poïétique n’étudie, selon Passeron, que la seule conduite créatrice, passant de la philosophie de la sensibilité à celle de l’action.
Si le terme poïétique fait bondir plus d’une personne, je voudrais juste rappeler que László Moholy Nagy, dans un ouvrage qu’il a écrit en 1929, intitulé Du matériau à l’architecture, tenait aussi du poïétique en ce qu’il considérait la création : non pas à partir d’autres discours sur le design, non pas à partir d’autres disciplines comme la philosophie, la sociologie, l’anthropologie ou encore la science.
Je viens d’évoquer deux termes comme ça, l’air de rien : pro-jet et pro-duit. Deux termes qui m’amènent à la 2ème notion, qui est un préfixe, pro- ! PolitiqueExtrait d’entretien avec Camille Louis enregistré le 18 novembre 2013. Il s’agit de considérer le politique autrement que comme la politique des politiciens, et de revenir à ce qu’est le politique, c’est-à-dire pólis, l’être ensemble, l’exister ensemble, l’habiter en commun. La réflexion sur le politique renvoie à la notion de commun et à une interrogation sur ce qui est convoqué à l’intérieur.
L’enjeu réside précisément dans la réappropriation d’un mode d’existence politique en commun, au sein duquel les individus ont un droit de regard sur la façon dont ils votent, dont ils sont représentés, etc. Il ne s’agit pas qu’une nouvelle force communiste vienne s’emparer de la politique pour faire un État.
Il s’agit d’interroger les modalités de notre implication politique dans la perspective d’un mode d’être quotidien.
Même en faisant comme si cela n’existait pas, tu es de fait, dedans. Savoir que cela existe, et savoir comment tu gères et tu mesures ton rapport avec le politique, c’est encore une fois, une émancipation. Ce n’est pas quelque chose de l’ordre de la libération mais c’est être conscient des structures dans lesquelles tu es pris. C’est savoir que tu peux les tordre de l’intérieur.
Extrait d’entretien avec Armel Le Coz enregistré le 25 janvier 2015. Politiques du commoningExtrait d’entretien avec Bruno Carballa enregistré le 04 avril 2016. Politiques du commoning est un terme que je soumets pour cette interview. Je traduirais d’abord le terme anglais commoning par l’idée de « faire du commun ».
Mon opinion est que l’État est un allier indispensable pour les communs. Par exemple, dans ma proposition sur les données, sans un État capable de prendre en charge les nouvelles règles sur la propriété intellectuelle, en collaborant avec les communs, il sera impossible d’avancer.
Il faut repenser là où l’État intervient dans l’économie, à la fois en laissant la place aux citoyens, mais aussi en les appuyant en terme de ressources, d’infrastructures et en faisant des politiques publiques adaptées. Un champ de recherche intéressant, dans tous les domaines, serait de penser les nouvelles compétences dont l’État aurait besoin.
Un des grand défi politique et académique réside donc dans notre capacité à penser comment un État peut se donner les moyens de développer les communs en repensant son rôle. D’un point de vue d’économiste, cela impliquerait que ces politiques publiques du commoning échapperaient à la politique de la concurrence.
En tout cas, tout ce qui relève des communs pourrait facilement être anti-concurrentiel. Si l’on veut voir l’État actif pour les communs, il faut véritablement révolutionner la conception que l’on a de la politique de la concurrence et lui faire une place à côté de cette politique publique du commoning, sans que celles-ci ne rentrent en conflit. PouvoirExtrait d’entretien avec Bruno Carballa enregistré le 04 avril 2016. La question centrale de ma thèse est celle du pouvoir. Si ma recherche concerne plus précisément le champ de l’économie, de la concurrence et du pouvoir de marché, je pense qu’elle interroge la question du pouvoir en général.
On voit que les plateformes qui ont accès à une ressource comme les données en grande quantité ont un pouvoir de marché important, justement, du fait qu’elles sont les seules à détenir cette grande quantité de données.
Évidemment, les communs n’éliminent pas le pouvoir comme forme de gestion de société, mais peuvent permettre de le redistribuer dans les communautés.
C’est pour cela que les communs intéressent également beaucoup les politologues. Pouvoir d’agirExtrait d’entretien avec Charlotte Rizzo enregistré le 29 novembre 2014. Extrait d’entretien avec Guillaume Coti enregistré le 25 mai 2016. Cette expression entend traduire un seul mot, empowerment, est une traduction un peu bancale et difficile à comprendre par rapport à la clarté du terme anglo-saxon.
PrécariatExtrait d’entretien avec Cyprien Tasset enregistré le 12 juillet 2018. Par le mot précariat, j’adresse plus largement toute la famille lexicale comprenant les termes précaire, précariat, précarité, etc. Je suis en train de préparer sous ce titre un numéro de la revue belge Émulations avec comme complices Adrien Mazière-Vaysse sociologue des mouvements sociaux de précaires et Giulia Mensitieri, sociologue du travail dans la mode. La façon dont nous travaillons cette idée de précariat est liée à un volet de mon travail, bien qu’Adrien Mazière-Vaysse et Giulia Mensitieri aient aussi fait ce genre de démarches à leur façon et par leur propre voie dans leurs travaux.
Pour ma part, j’ai particulièrement travaillé sur la genèse de cette famille lexicale en France. Cela m’a conduit à lire de nombreux documents syndicaux, journalistiques, politiques ainsi que des expertises publiques et de sociologie datant des années 70 et du début des années 80.
Sur les mots de la précarité, ce qui est intéressant est la manière dont ils sont en train d’être retravaillés au cours de ces dernières années. Il est intéressant de se déplacer par rapport à des références françaises qui sont utilisées à l’étranger.
Une idée, que nous avons dans le cadre de la préparation du numéro de la revue Émulations avec Adrien Mazière-Vaysse et Giulia Mensitieri est qu’au fond, une façon de caractériser le sens de ce glissement serait de dire que la notion de précarité pose de plus en plus la question de la subsistance et des différentes façons d’inventer des subsistances.
Pro-Extrait d’entretien avec Maxime Favard enregistré le 01 novembre 2018. La racine gréco-latine du préfixe pro- se définit comme avant, devant. pro- indique une antériorité, qu’elle soit de l’ordre du temporel comme du spatial. Mais encore pro- se comprend comme l’idée qu’une chose (ou une personne) est favorable à une autre. On retrouve un peu cette idée avec la poïesis qui, on l’a vu tout à l’heure, fait passer du non-être à l’être, pro- est ce qui fait naître.
Pour Andrea Branzi, il y aurait une diversité 4 fois supérieure d’objets que d’organismes vivants dans le monde et cela ne cesse de croître en s’accélérant.
Pour s’aventurer dans cette voie, il faut être à la fois un peu fou et habile. Je parlerais donc (pour ce qui est de la troisième notion) d’une capacité des designers à associer ces deux caractères (de folie et d’habileté) en la notion de manières. ProcessusExtrait d’entretien avec Jennifer Bonn enregistré le 18 novembre 2013. Le commun est associé à l’idée de quelque chose de non figé, d’un non objet, et de l’idée que le faire est plus important que le qui fait.
C’est un mouvement, ce n’est pas fixe. Les choses sont en train de changer. C’est ce que l’on fait qui compte, plus que nos propres personnes ou l’image que l’on peut développer autour de nos identités personnelles.
Extrait d’entretien avec Léa Eynaud enregistré le 14 novembre 2014. Processus démocratiqueExtrait d’entretien avec Benjamin Coriat enregistré le 17 juin 2015.
Par exemple, je peux être propriétaire d’un poids de 5kg, et pour autant, je n’ai pas le droit de le jeter par la fenêtre parce que je vais tuer quelqu’un.
J’ai intitulé mon livre Le retour des communs. La crise de l’idéologie propriétaire. parce que je soutiens l’argument que nous vivons dans une époque où précisément, nous nous rendons compte que nous avons fabriqué autour de l’idéologie de la propriété exclusive des tonnes de mythes.
Bien qu’elle soit encadrée par des textes, la gestion des biens, publics ou privés, donne lieu à toute sorte de débordements. Ce que peuvent permettre les communs, précisément parce qu’il y a des commoners, c’est-à-dire des collectifs d’acteurs qui gèrent les biens communs, ce sont des processus de décisions dans lesquels, à chaque étape et à chaque moment, il est possible de tenir compte de l’intérêt des uns et des autres, et surtout, de garantir la qualité de la ressource et sa préservation, voire même, quand il s’agit de communs informationnels, son enrichissement. ProfessionnalismeExtrait d’entretien avec Vincent Calame enregistré le 5 septembre 2013. Un des enjeux de la communauté du logiciel libre est de monter que le libre n’est pas une solution au rabais. Dans le cas du logiciel libre, on en a fait la preuve en ce qui concerne tout ce qui est serveur. 50 % des serveurs du monde tourne avec Apache, qui est du logiciel libre. Tout ce qui concerne les réseaux également.
Alors que les biens communs ne sont pas un pis aller. Le libre est un moyen de concevoir des outils de niveau professionnel voire supérieur à ce qu’une structure classique pourrait obtenir.
ProgrammeExtrait d’entretien avec Anthony Masure enregistré le 7 juin 2015. Au commencement de ma thèse, je souhaitais travailler sur les interfaces de lecture et d’écriture, et sur la façon dont celles-ci orientent des manières de lire ou d’écrire le texte, avec pourquoi pas des permutations de position entre l’auteur et le lecteur. Mais j’ai été assez vite bloqué dans ce thème parce qu’il y avait finalement trop d’informations à traiter. En étudiant iBooks , mon attention s’est alors portée sur la façon dont les interfaces orientent la façon de lire.
J’ai alors découvert Lev Manovich et tout le champ des Software Studies, qui ouvraient de perspectives de recherche stimulantes. J’ai donc associé ces enjeux de recherche en cultures numériques avec des lectures en philosophie et des auteurs comme Jacques Derrida, Hannah Arendt, ou même avec de la poésie en mobilisant par exemple Yves Bonnefoy, ou encore avec des auteurs en sciences humaines et sociales. Il s’agissait d’aller chercher et d’articuler des textes – parfois beaucoup plus anciens, comme Walter Benjamin, ou encore contemporains, comme Bernard Stiegler – pour les mettre en rapport et comprendre des choses qui auraient été mal formulées dans le vocabulaire de la création des logiciels et des programmes numériques. Le mot programme est assez intéressant parce que, historiquement, il n’est pas directement lié aux programmes informatiques. D’ailleurs, dans le titre de ma thèse, je parle de design des programmes. Cette méthode permettait finalement d’articuler la notion de programmes numériques – que tout le monde croit connaître – avec la notion de programme, et par derrière la notion de projet, qui est centrale. Assez vite, lorsque l’on parle de design, on parle de culture du projet. Qu’est-ce que cela veut dire ?
On pense au programme politique, par exemple : le candidat s’engage sur un certain nombre de tâches, qu’il va respecter ou non.
C’est par cette approche que beaucoup de logiciels sont vendus, via les campagnes marketing.
J’emploie également le terme d’appareil. Ne s’agit-il pas d’un travail commun, au sens où l’on ne serait pas dans une situation de maîtrise totale devant un ordinateur ?
Ce n’est pas un marteau. Un programme ne prolonge pas la main.
Il s’agit bien d’un travail à deux, où quelque chose se passe entre entre l’homme et la machine, qui produit une symbiose imprévue.
Gilbert Simondon avait analysé cela dans les machines outils dans les années 50-60, et parle aussi de machines ouvertes. C’est très étonnant car ses textes ne datent absolument pas de l’époque du numérique. C’est ce type de démarches qu’il faut soutenir et financer. Comment ? Cette question inquiète beaucoup de personnes. Moi, cela ne m’inquiète pas car le libre a des économies plurielles, qui sont d’ailleurs intéressantes à étudier. Les démarches inventives et la création de logiciels à priori expérimentaux et ouverts, qui ne rentrent pas dans des modèles économiques conventionnels, ne sont pas pour autant condamnées. Et le but du design n’est pas de gagner de l’argent.
PropriétéExtrait d’entretien avec Armel Le Coz enregistré le 25 janvier 2015. ProtocoleExtrait d’entretien avec Claire Dehove enregistré le 17 janvier 2019. Sur la question de la traçabilité, par exemple de l’Ambassade des Communs.
L’Ambassade à ses tampons, ses formulaires et à sa charte. À chaque fois, la charte est une manière de fixer une gouvernance commune approuvée par tous ceux qui vont contribuer au projet. Pour rentrer au sein de l’Ambassade, il y a une première charte qui a été élaborée avec les commanditaires. Par ailleurs, à l’issue de la phase de délégation, nous avons pensé qu’il fallait établir une seconde charte : une charte de délégation. Celle-ci notifie, par exemple, qu’à chaque soirée doit être mis en place le bureau de l’Ambassade, avec son classeur de fiches d’engagement, etc.
Les chartes et la Constitution des anarchives sont des protocoles important à déterminer. ProtoformeExtrait d’entretien avec Gwenaëlle Bertrand enregistré le 01 novembre 2018. J’emprunte le terme protoformes à Alessandro Mendini, qui en 1974 prend un peu de recul sur son travail éditorial au sein du magazine d’architecture Casabella en tentant d’expliquer pourquoi, depuis plusieurs années, il conçoit des artefacts qui ne sont pas destinés à leurs fonctions pratiques d’usage. Il explique, par exemple, pourquoi la chaise qu’il conçoit ne sert pas à s’asseoir, mais à représenter les usages, les rituels, les rapports possibles avec cette chaise, et ce que cela implique en terme de transformation de nos modes de vie. Plus qu’une forme, Alessandro Mendini conçoit une protoforme.
De nombreux architectes et designers s’attachent à développer une autre appréhension du monde par les moyens des protoformes : Urban Re-Identification Grid présentée par les architectes britaniques Alison Smithson (1928-1993) et Peter Smithson (1923-2003), Agronica et l’urbanisation faible d’Andrea Branzi dans le cadre du centre de recherche de la Domus Academy, ou encore les travaux d’Anthony Dunne et Fiona Raby. J’ai conscience aussi que les communs que ces designers mettent à l’épreuve se font à travers leur propre singularité, leur propre modes de représentation. Mais je pense qu’il existe un croisement entre ces territoires fictifs et une anthologie de l’action qui participe des communs
Je pense aussi à Gilbert Simondon , qui parlait d‘unités transductives. Gilbert Simondon expliquait que l’humain est en capacité de se déphaser par rapport à lui-même, de se déborder, se dérober de lui-même pour se constituer.
Dans l’histoire de l’architecture et du design, depuis quelques années, les protoformes concernent moins ce qui est constitutif d’un espace, qu’il soit extérieur ou intérieur, que ce qui est de l’ordre de la prothèse, et de ce qui peut relever du corps.
ProvisoireExtrait d’entretien avec Gwenaëlle Bertrand enregistré le 01 novembre 2018. La première notion que j’aimerais discuter est celle de provisoire. Il ne s’agit pas seulement de provisoire comme caractère palliatif, mais bien de ce provisoire qui requiert une habileté à prévoir, à pourvoir, à l’intérieur même d’une situation d’urgence.
Je pense notamment l’ouvrage d’Ernesto Oroza, Rikimbili. Une étude sur la désobéissance technologique et quelques formes de réinvention, qui met à jour les productions cubaines au regard des difficultés sociales, économiques et politiques rencontrées par le pays. Cuba est passé de l’influence des États-Unis à celle de l’URSS du point de vue de la culture vivrière. L’auteur Ernesto Oroza, par ailleurs artiste et designer, raconte qu’en premier lieu les cubains ont tenté de faire perdurer les objets américains. Mais finalement, une fois que les pièces mécaniques techniques, technologiques furent épuisées, un fait nouveau est apparu dans cette activité vitale de réparation : l’hybridation des pièces américaines récentes avec des produits
Ce qui n’était alors qu’un moyen provisoire de résistance est devenu, avec le temps, une méthode de gouvernance. C’est cette dimension qui m’intéresse dans la notion de provisoire.
Puissance publiqueExtrait d’entretien avec Valérie Peugeot enregistré le 09 juillet 2013.
Je pense à l’eau, par exemple. On peut considérer que c’est un bien commun global. C’est une ressource rare à l’échelle de la planète. La communauté humaine a besoin de prendre en main cette ressource et de la protéger. Mais si l’on ne s’appuie pas sur des instruments qui s’appellent les services publics, on n’y arrivera pas. Extrait d’entretien avec Anne-Sophie Olmos enregistré le 25 juillet 2017. QualitéExtrait d’entretien avec Raphaël Bastide enregistré le 27 octobre 2014.
Je me rends surtout compte de cela dans un contexte typographique. C’est à dire qu’en utilisant, produisant et analysant ce qu’est la typographie libre, je me suis rendu compte que, de la même manière qu’il n’y avait pas qu’un seul profil de designer, il n’y avait pas qu’une seule notion de qualité. La notion même de licence permet d’après moi de contribuer à la qualité d’une fonte quelque soit sa qualité graphique.
RechercheExtrait d’entretien avec Raphaël Bastide enregistré le 27 octobre 2014.
Dans le contexte leurs parcours, les étudiants en Art, en Design, sont très ouverts à de nouvelles choses. Je pense qu’il faut profiter de ces moments là, et c’est pour cela que je m’intéresse vraiment à la formation et à l’enseignement. Il faut savoir se saisir de ces moments pour offrir un maximum d’alternatives, au sens très large, et de richesses théorique et technologique. Bien sûr, le logiciel libre est un moyen d’offrir cette richesse là. Mais il est aussi du rôle des professeurs de se remettre perpétuellement en question et de ne plus venir en tant qu’auteur accompli, mais plutôt en tant qu’ancien étudiant. Il serait intéressant de voir si le professeur en tant que maître – au sens maîtrisant une technique – a toujours sa place dans une école d’Art. Je pense que c’est surtout des profils de co-chercheurs, de gens qui apprennent davantage à chercher qu’à trouver, dont l’école a besoin. Il faut apprendre aux étudiants à se situer dans la transversalité plutôt que d’approfondir un sujet avec un mentor. Je pense qu’il est important d’offrir cette richesse, que je considère comme un « commun », au sens où je l’ai compris. RéciprocitéExtrait d’entretien avec Laura Aufrère enregistré le 2 juin 2018. La réciprocité, à travers une lecture par les communs et par l’économie solidaire, est un des termes qui exprime le mieux le fait de reconnaître l’autre dans sa dignité et de reconnaître chez l’autre la partie humaine que l’on partage.
On cherche toujours une raison à l’échange, et qui dépasse l’échange lui-même.
Et je crois que le commun est porteur de cela. RègleExtrait d’entretien avec Benjamin Coriat enregistré le 17 juin 2015. Ce qui caractérise les communs tangibles est que la ressource est épuisable. C’est pourquoi les règles, le faisceau de droits et les processus de décision qui les entourent doivent viser, pour l’essentiel, la préservation de la ressource. Les règles seront des règles de prélèvements afin que l’on s’assure de ne pas détruire la ressource. Si jamais l’on s’aperçoit que les règles de prélèvement conduisent à un épuisement de la ressource, alors ces règles seront modifiées. En revanche, les communs intangibles sont basés sur l’information, c’est-à-dire sur des biens non rivaux que l’on peut exploiter autant que l’on veut. C’est pourquoi les règles qui encadrent ces communs seront tournées vers l’enrichissement de la base. Pour ne pas gâcher la qualité du commun, en mettant en son sein des informations fausses qui rendraient suspect le bénéfice du commun, il faut qu’il y ait des gardiens garantissant la confiance et la fiabilité vis-à-vis des usagers.
RéinventionOn évolue vite, on est tout le temps en train de se réadapter, de se chercher. C’est une dynamique de recherche-action intéressante, que l’on a réussi à préserver malgré la croissance.
RéplicabilitéExtrait d’entretien avec Jennifer Bonn enregistré le 18 novembre 2013. Extrait d’entretien avec Charlotte Rizzo enregistré le 29 novembre 2014. RépublicainExtrait d’entretien avec Olivier Jaspart enregistré le 28 mars 2019. RéseauExtrait d’entretien avec Jennifer Bonn enregistré le 18 novembre 2013.
Le tissage de ce réseau fait la force des minorités, qui restent des minorités mais qui y trouvent une puissance de par ces liens. On observe une sorte d’éclatement du pouvoir, rendu possible par les réseaux, c’est-à-dire par le biais d’internet et par ses échos très concrets au sein des organisations sociales. Extrait d’entretien avec Émeline Brulé enregistré le 10 décembre 2013. Internet est selon moi notre premier commun. C’est un espace où tout est faisable en très peu de temps. Nos potentiels sont effectivement augmentés, en terme de rencontre, d’accès à l’information. Internet permet de maintenir divers foyers. Pour ma part, j’ai un usage des réseaux sociaux élaboré pour lier les gens issus des différentes villes où j’ai habité et faire en sorte que, même si je n’ai pas eu le temps de prendre des nouvelles ou d’en donner, tout le monde ait accès la publication d’une trame narrative principale.
En écho au sujet de l’Utopie, se pose là cette question de la construction des mythes communs. Construire une vision du monde qui soit commune est très difficile parce que, si l’on fait un manifeste ou une loi, on se range à l’avis de la majorité. Ce n’est pas l’avis du peuple mais l’avis de la majorité, et ce n’est pas pareil. Comment fait-on le lien entre les deux ? Si je prends l’exemple de La Manif pour tous, je m’interroge. Si cela est représentatif de notre société, alors je n’ai pas particulièrement envie d’en faire partie. Dans Filter Bubble, Eli Pariser décrit un internet personnalisé, qui ne nous permettrait plus la confrontation avec d’autres points de vue que le notre de par un fonctionnement en silo. Il décrit un web au travers duquel on saurait toujours exactement sur quel site on navigue, sans risque de tomber, par sérendipité, sur des contenus qui ne seraient pas de notre bord. Extrait d’entretien avec Maïa Dereva enregistré le 6 décembre 2017. RésilienceExtrait d’entretien avec Lionel Maurel enregistré le 25 juillet 2013.
On a observé une telle perte de confiance dans le système tel qu’il est construit, que beaucoup ont émis l’hypothèse qu’il faudra peut-être un jour se raccrocher à un système différent. On a déjà vu, historiquement, des grands effondrements d’empire où la monnaie à jouer un rôle important. Quand on perd confiance dans la monnaie d’un système, en général, celui-ci s’effondre très rapidement.
Ce qui pousse également ce mouvement en avant, c’est la perte de contrôle des États. Ceci est beaucoup lié aussi au numérique quelque part. Les États ont de plus en plus de mal à exercer leurs compétences souveraines. Des formes décentralisées en peer-to-peer permettent de réaliser des choses sur lesquels les États n’ont plus de contrôle. Bitcoin est l’exemple même de quelque chose qui a émergé sans que les États n’aient pu le réguler au départ. Maintenant, les États essaient de reprendre le contrôle, mais à la base, ils n’ont pu empêcher que cela se lance. RéversibilitéExtrait d’entretien avec Sophie Ricard enregistré le 24 juin 2017. La question de la réversibilité de l’ architecture est une notion très forte. Elle vient, je pense, après la question du rapport à l’autre et de la confiance, d’où naît l’hospitalité.
Nous nous sommes desappropriés ce champ, et c’est dramatique.
RichesseExtrait d’entretien avec Mathieu Coste enregistré le 21 octobre 2014.
Dans un monde de rareté, l’intérêt individuel et la peur de chacun de ne pas avoir une partie de la ressource empêche la pensée même du bien commun.
Risque climatiqueExtrait d’entretien avec Gauthier Roussilhe enregistré le 9 septembre 2018. RuralitéExtrait d’entretien avec Gauthier Roussilhe enregistré le 9 septembre 2018. Savoirs situésExtrait d’entretien avec Cyria Emelianoff enregistré le 17 mars 2018. Je tiens à l’écologie située, aux savoirs situés.
Par exemple, en terme de justice environnementale, il y a eu beaucoup de déni par rapport aux dégâts des pollutions sur les êtres humains, sur leur santé.
Le savoir situé est un savoir qui est adapté à un lieu, un environnement, une époque et qui s’articule avec d’autres savoirs en présence dans le même lieu. Cette forme de savoir peut être à même de repenser le mode d’habiter la terre à de multiples échelles.
Dans le cadre de ce séminaire d’écologie pirate, nous abordons ces savoirs situés avec un cas très concret, localisé et circonscrit à la Ferme de la Mhotte.
À la Ferme de la Mhotte par exemple, nous avons interviewé un éleveur qui a développé tout un savoir sur l’immunité de ses vaches et sur le principe de cohabitation avec le parasite. Depuis, cet éleveur a rejoint le laboratoire d’écologie pirate, vient à toutes les réunions et prend part aux actions, y compris à nos arbitrages sur le site internet Passé du statut d’enquêté au statut de membre du collectif, cet éleveur a trouvé dans le laboratoire pirate un espace de reconnaissance. Nous avons reconnu l’importance et la justesse de son témoignage. SensibleExtrait d’entretien avec Pauline Cescau enregistré le 22 juillet 2018. SérendipitéExtrait d’entretien avec Marine Seemuller enregistré le 5 décembre 2014. Comment un lieu peut-il accueillir les activités les plus animées et les plus ouvertes sur l’espace public ?
Comment les espaces publics, de part leur localisation, leur taille et leur programmation, sont-ils à même d’accueillir les différents usagers ? Comment, quand j’aménage un parc, j’accueille aussi bien les étudiants du campus que les enfants qui sortent de l’école et qui vont jouer avant de rentrer faire leurs devoirs ? Ce sont ces rencontres-là qui sont à prévoir, tout en ayant en tête que l’on ne peut pas tout mixer non plus. Il faut équilibrer cette mixité. Service écosystémiqueExtrait d’entretien avec Alexandre Guttmann enregistré le 12 avril 2018. Service publicExtrait d’entretien avec Olivier Jaspart enregistré le 28 mars 2019. SimilitudeExtrait d’entretien avec Nathan Stern enregistré le 15 octobre 2013. J’ai l’impression que l’on ne peut pas envisager la notion de biens communs sans se douter que l’on a des choses en commun. Si nous sommes en capacité de partager un bien, c’est parce que nous avons des similitudes les uns avec les autres. Nous sommes surtout sensibles à nos différences, à notre individualité, notre singularité, et à ce qui fait que chacun de nous est irréductible. Irréductiblement seul, isolé ou différent des autres.
Il faut se rappeler que nous sommes semblables à plein d’égards. Nous avons en commun des besoins, des attentes et des aspirations.
SingularitéExtrait d’entretien avec Camille Louis enregistré le 18 novembre 2013. Il s’agit d’interroger les notions commun/singularité et individu/société. Commun/singularité implique l’idée d’une construction organique ou dynamique des existences singulières. C’est parce qu’il y a existences singulières que se construisent rencontre et création de communs. Alors que les notions individu/société sont des concepts nés d’une construction qui est, selon moi, datée. À un moment, on a parlé de société avec à l’intérieur des individus pensés comme des atomes. Et à partir de là, on a pensé les relations sociales comme des relations de points à points. Alors que le rapport d’une singularité à un commun, c’est la phrase et son exemplification, pour reprendre Giorgio Agamben. Une phrase peut être la même phrase pour tous. Mais à chaque appropriation de cette phrase par un individu, celle-ci devient l’exemplification d’une phrase commune. Cette phrase fait alors apparaitre le commun, parce que je la comprend, et en même temps une singularité, parce que celle-ci est dite avec une certaine voix et un certain corps. C’est toujours la relation entre les deux qui fait que et singulier et commun existent. C’est un rapport dynamique. Alors que dans les notions société/individu renvoie à la société civile et au contrat social, qui sont des idées, des illusions et des mythes. C’est pourquoi, il est extrêmement important pour moi de revenir à cet équilibre et cette vision dynamique qu’impliquent les notions de singulier et de commun.
SolidaritéExtrait d’entretien avec Laura Aufrère enregistré le 2 juin 2018. Alain Supiot, dans ses cours au Collège de France, a mobilisé toute une communauté de chercheurs, et il y a une présentation de l’histoire du mot de solidarité.
Alors que l’on a un peu l’impression, ces derniers temps, que la solidarité se décrète, parce qu’il y a une revendication, je crois maintenant que l’on a tous ensemble un travail à faire pour exprimer la solidarité, au-delà de la façon dont nous on exige de nous qu’on l’a décrète.
Notre solidité humaine est dans la solidarité. Et cela rejoint la question du processus de paix, de savoir vivre ensemble. SouverainetéExtrait d’entretien avec Frank Adebiaye enregistré le 19 septembre 2013. Ce travail est inspiré de La ligne droite de Georges Moustaki, qui est une chanson absolument admirable. J’ai utilisé une typo libre. Je trouvais que la forme était amusante. Cela faisait longtemps que je voulais faire cette affiche. J’ai mis tout de même 5 heures pour la faire car il fallait vraiment réaliser un travail sur chaque lettre pour que cela puisse coller. Mais j’étais assez content du résultat. Je voulais faire mon hommage à Moustaki.
Il y a quelque temps, dans un débat sur le mariage pour tous, il était dit que « faire des enfants, c’était quelque part ne pas savoir ce que l’on faisait ». Et je trouvais cela assez intéressant parce qu’il y a en effet une sorte de plongée dans l’inconnu. Faire quelque chose qui est infiniment commun à la nature humaine et puis qui va nous échapper un peu quelque part. Avoir un enfant n’est pas créer une copie conforme. Ce n’est pas juste une gloire de propriétaire, une nouvelle extension de moi-même. Ce n’est pas cela. C’est faire quelque chose qui nous dépasse.
On a du mal à lâcher, à accepter de perdre le contrôle, en particulier quand on est en situation de puissance. C’est pour cela que c’est aussi un enjeu politique important. Tous ceux qui ont des choses à perdre sont d’autant moins enclins à partager et à mettre au pot commun. Parce que cela veut dire que d’autres personnes pourront en profiter. Il y a un problème de souveraineté. Est-ce que les biens communs sont compatibles avec la souveraineté ? SpontanéitéExtrait d’entretien avec Pauline Cescau enregistré le 22 juillet 2018. StigmergieExtrait d’entretien avec Maïa Dereva enregistré le 6 décembre 2017.
En tout cas, c’est la manière dont je les ai pratiqués jusqu’à aujourd’hui, dans le pair à pair et la stigmergie.
Il s’agit moins de passer des heures à discuter de ce qu’il faudrait faire ou pas, de ce qui est bien ou pas.
À Lille, dans le cadre des Assemblées des communs, c’est vraiment cette stigmergie qui, dans la pratique, m’a le plus plu. Bien sûr, il y a eu des aménagements. L’auto-organisation totale manque de chaleur et d’accueil. J’ai eu à cœur aussi de proposer un dispositif de rencontre du groupe, avant de lancer les ateliers. Mais c’était un ajustement. L’état d’esprit est là. StatactivismeExtrait d’entretien avec Cyprien Tasset enregistré le 12 juillet 2018. Le travail sur la notion de statactivisme a été à la fois une parenthèse dans ma thèse sur le travail intellectuel précaire, et un projet de collaboration assez excitant. En partant des travaux d’Alain Desrosières sur la sociologie de la quantification, un groupe de chercheurs autour d’Emmanuel Didier et aussi d’artistes comme Julien Prévieux s’est mis à réfléchir à ce que pouvait apporter la quantification, et les différentes façons de quantifier, à du militantisme qui vise de l’émancipation. C’était aussi un moment où il y avait un essor des réflexions contre le nombre et la quantification, perçue exclusivement sous son versant aliénant, lié à la dépossession, à la destruction du rapport au monde, et à la sérialisation, confinant l’individu dans l’isolement et dans des relations de concurrence avec les autres. En partant d’un certain nombre d’expériences militantes, artistiques et scientifiques, l’idée de Statactivisme était de traduire la multitude des façons de quantifier. À un style de quantification, on peut en opposer d’autres. Il s’agissait de dire qu’il ne faut pas réifier le nombre comme une chose unique, porteuse de potentialités politiques uniques.
On défait le couple nombre / mathématique / froideur / aliénation d’un côté, et de l’autre créativité / authenticité / rapports humains chaleureux, et mettant la créativité et la contestation aussi du côté des usages du nombre, et pas seulement de leur refus. L’idée du livre Statactivisme était de partir d’un certain nombre de pratiques, d’essayer de formuler ce qu’elles avaient en commun, d’une façon qui en inspire d’autres.
TechnicienExtrait d’entretien avec Olivier Jaspart enregistré le 28 mars 2019. TemporalitéExtrait d’entretien avec Violaine Hacker enregistré le 20 octobre 2014.
Les ressources, que ce soit les savoirs ou l’environnement, ne seront pas analyser à un point T, mais dans une vision dynamique, prenant en compte le passé et les réflexions sur les manières de penser l’avenir. Concrètement, ce point de vue amène à penser les communs d’une autre façon, en parlant notamment de la création et de transmission.
TempsExtrait d’entretien avec Frank Adebiaye enregistré le 19 septembre 2013.
On aura beau faire beaucoup de projets, il est avant tout nécessaire d’inscrire ces projets dans un temps commun, dans un agenda. Ce qu’il faut faire, on le met dans un agenda, et cet agenda s’inscrit dans un temps.
Après moi, le déluge. C’est ce qu’il se passe. Par exemple en politique, parce que les hommes politiques sont dans un temps électoral, les municipales, les rapports financiers semestriels voir trimestriels. C’est ce temps là. Nous sommes enchâssés dans cette nasse. Et tant que l’on ne fixe pas les choses dans le temps, tant que l’on ne prend pas date, on ne peut pas dire que l’on va faire des choses communes.
Si l’on ne prend pas de temps pour les autres, il n’y a pas de bien commun.
Si il y a une crise du logement, c’est parce que les gens ne vivent plus ensemble. Au lieu d’avoir un F2 il faut deux F1, etc… Tiers-lieuxExtrait d’entretien avec Aurélien Marty enregistré le 16 février 2015. Extrait d’entretien avec Laura Aufrère enregistré le 2 juin 2018. Ce qui m’a semblé très riche lors de la table ronde tient au fait que les interventions avaient une approche très organisationnelle et processuelle des tiers-lieux. En fait, j’ai trouvé cela vraiment très intéressant parce qu’au fond, et c’est peut-être là qu’était le lien avec ce que moi j’essaie de travailler, il s’agissait de dire que l’approche par les communs – et c’est ce que disent des chercheurs comme Benjamin Coriat, ou encore Pierre Dardot et Christian Laval, c’est considérer les communs par le remplissage politique advenu ces dernières années.
En effet, ce n’est pas parce que l’on observe une très belle diversité de pratiques, un engouement et un renouveau des pratiques collectives qu’il n’y pas aussi un rapport de force, et de la violence politique et technique qui s’exerce.
C’est-à-dire que, plutôt que de trouver une boîte à outils et de l’appliquer avec ce principe de réplicabilité, de scalabilité et de passage à l’échelle, l’enjeu est de reconnaître les savoirs qui sont développés par les praticiens, sans les réduire à un corpus figé, mais de les prendre en compte comme un mouvement démocratique en tant que tel. TransitionTransitoireExtrait d’entretien avec Pauline Cescau enregistré le 22 juillet 2018. TransparenceExtrait d’entretien avec Étienne Hayem enregistré le 6 décembre 2013. Le second aspect qui me parait important c’est la transparence. Lorsque je découvre un site, une entreprise, mon premier réflexe est d’aller voir les personnes qui constituent la structure pour en comprendre la vision, la mission et l’activité. Je m’intéresse à son organigramme et ses modalités de gouvernance. Au sein d’une structure, si la transparence n’existe pas, nous ne sommes pas en capacité d’en comprendre le fonctionnement. Le manque de transparence nous empêche l’accès aux pouvoirs de décision et par conséquent aux leviers à faire bouger pour défendre un intérêt.
Sur le site internet de cette structure par exemple, nous devons pouvoir voir qui décide, comment on décide, comment sont prises les décisions et qui a pris les dernières décisions. Extrait d’entretien avec Julien Lecaille enregistré le 10 décembre 2017.
Nous sommes dans des systèmes qui ne reconnaissent pas forcément des formes de droit bourgeois à la propriété privée.
Ce sont objectivement des formes de conquêtes qui sont arrivées dans l’histoire, et qui n’étaient pas évidentes, parce qu’il y avait auparavant le pouvoir du seigneur, du roi et d’un certain nombre d’institutions qui ne respectaient pas les formes de vie privée et de propriété privée.
Ce n’est pas évident, et il n’y a pas de vocation à imposer la notion de communs à un ensemble de gens.
La question de la transparence repose sur un équilibre complexe, d’autant plus dans un contexte où les données privées ont une très grande valeur commerciale. Une multitude de structures commerciales cherchent l’accès à cette donnée pour orienter des logiques de ventes. Il faut en avoir tout à fait conscience et cela n’est pas simple. Pour autant, ces questions privées ont vraiment de l’importance et de la valeur.
C’est un vrai choix qui oriente le système, la survie des organisations. Quel niveau de générosité devons-nous accorder lorsque nous partageons nos données en toute transparence sur des plateformes dans lesquelles nous avons confiance ?
SF : Est-ce que les communs sont en voie de construire ces cadres pour légiférer sur ces questions ? Sur ces questions, je pense que nous allons avoir besoin d’un soutien massif de l’État et des formes étatiques.
Extrait d’entretien avec Pascal Derville enregistré le 17 mars 2015. TransversalitéExtrait d’entretien avec Irene Favero enregistré le 10 septembre 2013. TravailExtrait d’entretien avec Laura Aufrère enregistré le 2 juin 2018. À mon sens, le deuxième mot qui me relie aux communs, c’est la question du travail, au sens d’un travail du monde. Si l’on considère qu’il y a une dimension collective à l’intérieur de chacun des individus, alors le travail ne peut plus être, par rapport au monde, cette espèce de violence de devoir soit absorbé le monde, soit de devoir l’exprimer à travers une seule bouche.
Il s’agit de construire collectivement un rapport tenable au monde. Et si le travail n’est pas cela, alors je pense que ce ceci devient un travail inhumain.
L’approche écologiste est intéressante sur ce sujet, que l’on retrouve également dans les travaux d’Elinor Ostrom. Sur ce sujet, je renvoie aux travaux de Jean-Marie Schaeffer, et notamment à son livre La fin de l’exception humaine (1), qui parle de l’art comme une forme humaine d’expression du monde, qui doit pouvoir s’articuler avec les autres.
Extrait d’entretien avec Ophélie Deyrolle enregistré le 21 juillet 2018. Interroger la notion de travail est d’abord lié mon histoire personnelle et aux réponses que je cherche à trouver au travers de la Grande Halle et les tiers-lieux. La notion de travail est centrale dans les tiers-lieux. Beaucoup de tiers-lieux sont avant tout des coworkings ou des communautés d’affaires de gens qui viennent d’abord pour travailler et rencontrer d’autres individus. Mon rapport au travail est très intense, c’est une part très importante de ma vie et j’y consacre beaucoup de temps parce que j’adore ce que je fais. Aussi, j’ai eu envie de travailler autrement. Quand j’ai découvert le monde des tiers-lieux, les façons travailler autrement, la plus grande liberté que les indépendants peuvent avoir malgré les risques de précarité, cela m’a beaucoup attiré.
J’ai un sentiment encore ambivalent concernant les tiers-lieux sur les problématiques de travail. Il s’agit de trouver le bon équilibre pour ne pas tendre à des pratiques qui déconstruiraient un modèle social, de protection sociale et de protection du travailleur et évoluer tout de même vers des modèles qui permettent plus d’indépendance.
Il me semble nécessaire d’être très vigilant sur ces questions et de sans cesse les discuter. Que recouvre la notion de travail ? Est-elle forcément associée au salariat, à la rémunération ?
Nous pouvons notamment avoir une vraie posture sur la question des auto-entrepreneurs et des micro-entrepreneurs. S’il existe déjà, finalement, un certain nombre de propositions pour soutenir et financer les créateurs de projets et de startups, les petits artisans et les individus qui se positionnent sur des services très ponctuels sont quand à eux toujours très isolés et peu soutenus. À la Grande Halle, nous devons prendre en compte et nous adapter à ces situations en adaptant nos tarifs. Ces derniers mois, j’ai eu besoin de me renforcer conceptuellement et théoriquement sur ces enjeux, pour justement prendre conscience de ces phénomènes et trouver le bon équilibre. Pour un projet comme celui de la Grande Halle, il est nécessaire mais difficile de concilier les deux démarches, travailler à court terme à la sortie du projet, tout en gardant un niveau de réflexion à long terme sur ces enjeux de société. ValeurExtrait d’entretien avec Irene Favero enregistré le 10 septembre 2013. Il s’agit de repenser nos indicateurs et de chercher de nouvelles façons d’évaluer.
Extrait d’entretien avec Alexandre Monnin enregistré le 21 août 2017. Je souhaiterais ici parler de valeur, non pas au sens de la valeur morale tel qu’on peut l’entendre habituellement. Pas uniquement non plus au sens de valeur marchande qui se traduit par la valeur d’échange. Il s’agirait plutôt ici de parler de valeurs, c’est-à-dire de quelque chose qui associe ces deux sens du mot valeur, et qui permette de les penser ensemble.
C’est-à-dire ce à quoi nous donnons de la valeur, ce que nous valorisons, et en même temps ce qui nous tient, c’est-à-dire ce dont on hérite, auquel on est attaché qu’on le veuille ou non. Nous sommes attachés à nos conditions d’existence, à nos infrastructures, même si elles sont négatives et qu’elles nous entraînent aussi parfois sur une pente dangereuse. Ce qui m’intéresse est de donner à voir la valeur produite par une institution à tous les niveaux. Et cette valeur est quelque chose d’invisible.
Cela peut tenir, par exemple, à la contribution des mères qui s’occupent des enfants – quelque chose qui ne serait pas forcément valorisé sur le mode d’un salaire – proposition qui rappelle plutôt des programmes d’extrême droite – mais par des formes de valorisation à inventer. Cette valeur est de fait produite par une activité – essentiellement féminine – et sans laquelle finalement d’autres activités ne pourraient pas se développer. Il s’agit de comprendre la valeur produite par une institution, une organisation ou un acteur, à tous les niveaux, et d’essayer de lui donner les moyens de la donner à voir.
L’idée est d’aller voir des institutions et d’essayer de comprendre la valeur qu’elles produisent, au-delà de ce qui est pris en compte lorsqu’on les évaluent.
Pour avoir une vision précise de ce que sont les communs, il faudrait aussi se donner la capacité d’appréhender finalement ces valeurs qui ne sont pas des valeurs d’échange mais qui dépassent une vision classique de l’économie. Extrait d’entretien avec Julien Lecaille enregistré le 10 décembre 2017. J’aime beaucoup le mot valeur, car en fonction des contextes, on se retrouve à parler de valeurs en qualitatif ou alors en quantitatif. D’une part, on parle de valeur parce que c’est une qualité indépassable pour l’espèce humaine. C’est dans l’absolu une référence morale. Suivant le contexte, on utilise le terme dans ses deux acceptions différentes. Et cela dit bien tout le problème que l’on a avec cette notion de valeur qui, je pense, va s’amplifier dans le monde un peu incertain dans lequel nous arrivons. Dans une société traditionnelle, on sait parfaitement ce dont on a besoin. On sait ce qui compte pour les uns et les autres. Par exemple, on sait qu’il y a besoin d’un certain nombre de quantité de bois pour se chauffer, de poissons pour se nourrir. On a des valeurs qui peuvent être fixées de manière très claire et on peut avoir un système très lisible et très facilement transmissible à la génération future. En revanche, quand on est dans un système en mutation, très violente et déstabilisante, on rencontre un vrai problème en ce qui concerne la valeur et sa définition.
Nous sommes dans un flou total, et nous nous rendons compte que nous avons produit un certain nombre de biens et de services et tout un système industriel pour répondre au besoin des uns et des autres. Nous avons habitué la société à une consommation d’un certain nombre de choses qui étaient déjà pré-pensées, déjà fournies par le modèle industriel.
Les valeurs d’une décennie ne seront plus les mêmes que lors de la décennie précédente.
On ne sait pas forcement à quoi servent les choses, mais on sait qu’il y a une ressource et des gens intéressés par utiliser cette ressource. On sait que ces gens qui vont devoir discuter ensemble dans le périmètre de communs pour fixer des valeurs et des règles d’usage. Les règles d’usage qui vont être fixées auront un impact sur la valeur des choses. Les choses très utiles auront plus de valeur que les choses moins utiles, selon les usages.
Pour envisager un tel cadre, il faudra accepter un certain relativisme. Valeur d’usageExtrait d’entretien avec Sophie Ricard enregistré le 24 juin 2017. La notion de valeur d’usage est celle qui me paraît maintenant importante, et celle sur laquelle on essaie de travailler.
VersioningExtrait d’entretien avec Raphaël Bastide enregistré le 27 octobre 2014. D’un point de vue plus artistique, je m’intéresse depuis quelques années aussi à la manière dont on peut versionner les objets dans l’espace, et comment l’objet peut conceptuellement être influencé par des notions légales et surtout de licences. Cela rejoint les problématiques des associations dont je fait parti.
C’est un chantier que je vais continuer dès que j’en ai l’occasion. VivantExtrait d’entretien avec Nathalie Blanc enregistré le 17 avril 2018. Vivre est un mot extrêmement complexe. On ne sait pas encore très bien comment l’on appréhende cette question de la vie. Où commence t-elle ? Où finit-elle ? On voit bien qu’aujourd’hui, avec les premiers signes annonciateurs d’un effondrement écologique, que l’on a des soucis à se faire sur les questions de la santé, des maladies chroniques, des maladies qui résultent d’une immersion avec des éléments chimiques, et des réactions que l’on ne connaît pas encore.
Comment pose-t-on cette question à nouveaux frais, dans l’espace urbain et dans tous les autres types d’espaces ? C’est une question de vigilance vis-à-vis de nos corps, et de nos corps en interaction. Web 2.0Extrait d’entretien avec Anthony Masure enregistré le 7 juin 2015. Un chapitre de ma thèse s’intitule Ouverture et fermeture du web 2.0. En apparence, l’expression Web 2.0 est un peu passée de mode. Pourtant, je la rencontre encore souvent. Parfois on croise 3.0, ou web 3.0 voir 2.0, qui devient une espèce de suffixe à tout faire.
J’ai été voir l’histoire de cette expression, et j’ai trouvé un texte de Tim O’Reilly intitulé What is web 2.0 ? qui date de 2005 Tim O’Reilly est un consultant et un business angel. Il vend très cher son expertise par des conférences ou du consulting pour des entreprises.
Ces technologies s’appuyaient notamment sur du javascript ou des fonctions de publication semi-ouvertes ou partageables permises par des codes sources, qui se structurèrent en 2004 dans des librairies et des frameworks, pour faire de nouveaux types de sites web a priori plus dynamiques, et des systèmes d’information collaboratifs et contributifs. Selon O’Reilly, ces sites permettaient à n’importe quel individu, à une prétendue sagesse des foules, d’ajouter des contenus, de les partager, les relier, et de créer des systèmes d’information a priori ouverts. Il s’agissaient finalement de déporter un travail, fait à la base par des éditeurs, à tout à chacun. Des sites comme Digg sont emblématiques de ce phénomène.
Le titre de l’article de Tim O’Reilly comporte pour sous-titre Design Patterns and Business Models for the Next Generation of Software.
Cette nouvelle économie, soutenue par Tim O’Reilly en 2004, était-elle si novatrice ? Des textes fondateurs des théories du libéralisme, comme ceux d’Adam Smith se basent sur l’étude des singularités égoïstes et la recherche du profit pour des intérêts personnels. Ces textes affirment que par la compétition, les choses s’améliorent et profitent à tous.
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